Bilan de l’année : activité scientifique du musée (2/4)

Chaque dimanche du mois de décembre, nous revenons sur un temps fort pour le musée cette année.


Lucia Guirguis a présenté une conférence sur la restauration d’Orphée charmant les animaux le 16 février dernier, et le Public a répondu présent à son invitation à venir découvrir les techniques complexes mises en œuvre pour rendre son éclat à ce tableau majeur du musée.


De nouvelles conférences vous permettront de découvrir d’autres aspects des collections du musée durant l’année 2020…

Détail du mois de décembre : Hélène enlevée !

Le détail du mois de décembre vous révèle une peinture inédite des réserves, une jolie copie de l’Enlèvement d’Hélène par Lubin Baugin (1612, Pithiviers – 1663, Paris), dont l’original est visible au musée des Beaux-Arts de Dijon. D’assez bonne facture, notre copie est peut-être une deuxième version confiée à l’atelier du peintre.

On y voit représenté une des figures les plus célèbres des textes d’Homère : Hélène. Celle-ci est à l’origine de la fameuse Guerre de Troie et des récits épiques de l’Iliade, car c’est suite à son enlèvement par le troyen Pâris, que l’on voit représenté, enlaçant Hélène pour l’emporter sur son bateau, que va avoir lieu le siège de la ville de Troie. Si dans le récit original Hélène cède facilement à Pâris, l’Occident médiéval va dans ses réécritures déculpabiliser Hélène et présenter qu’elle a bel et bien été enlevée. Ces mêmes récits ont sans doute influencé la réalisation de cet enlèvement, mettant en valeur la jeune femme comme figure centrale à l‘origine de la Guerre de Troie, et renforce le préjugé commun pour l’époque de la Femme comme source de conflits et d’intrigues.

Pour découvrir l’ensemble de l’œuvre, venez la voir au musée Jeanne d’Aboville ! Vous pouvez également la découvrir dans un article paru ce mois-ci dans le mémoire 2019 de la Fédération des Société d’Histoire et d’Archéologie de l’Aisne, disponible auprès des librairies et des Archives départementales.

Il y a un an revenait Orphée…

Il y a un an jour pour jour, une dizaine de personnes s’échinaient à déplacer le plus délicatement possible le géant de la Collection d’Héricourt de Valincourt : le fameux Orphée charmant les animaux. Après avoir réussi l’ascension des deux étages du bâtiment du musée, le tableau rejoignait la salle de peinture italienne où il devait élire domicile au sein de la collection permanente.

Mis en valeur cette année avec une exposition et une conférence qui revenait sur sa restauration, le tableau vous attend si vous ne l’avez pas déjà (re)découvert !

Détail du mois d’octobre 2019 : des mains et un crâne…

Le détail du mois provient d’un tableau tout juste revenu au musée, après un prêt à la Préfecture de l’Aisne dans le cadre des Journées du Patrimoine. Il s’agit de Saint Jérôme méditant sur un crane de Joseph Marie Vien. Précurseur du néoclassicisme, Vien est un passionné de peinture antique suite à sa visite d’Herculanum, nouvellement découverte. Sous cette influence il arbore dans sa peinture un style sévère, d’abord peu apprécié mais Boucher, qui reconnait ses mérites, le fait entrer à l’Académie de peinture. À sa mort en 1809, Napoléon lui fait l’honneur de funérailles nationales au Panthéon, où il est le seul artiste peintre à reposer.

Sur ce détail on peut apercevoir les mains de Jérôme de Stridon, un moine mystique considéré comme l’un des Pères de l’Église. Il tient un crane symbolisant la mort et la précarité de l’existence, commune à tout humain. Ce tableau reprend les principes des Vanités nordiques en confrontant l’humain à sa destinée prochaine et témoigne de l’approche austère de la religion qui est adoptée par une frange de la population de l’époque, en opposition aux Libertins.

Pour découvrir l’ensemble de l’œuvre, venez la voir au musée Jeanne d’Aboville !

Retour sur les JEP 2019

Les Journées Européennes du patrimoine ce week-end ont été l’occasion pour le public de découvrir le musée autrement, via le thème de la symbolique des couleurs qui était mis à l’honneur, mais aussi d’aller à la rencontre de toiles inédites des réserves exposées exceptionnellement à Laon, au sein de la préfecture de l’Aisne.

Petit retour en photos et vidéos sur l’événement :

L’installation éphémère “Voyage au Pays des Couleurs” en mouvement

 

Exposition “couleurs sacrées” à l’église Saint Montain de La Fère

Installation “Nébuleuse colorée”, église Saint Montain

Exposition temporaire de tableaux à la préfecture de l’Aisne

Inauguration de l’exposition temporaire à la Préfecture, photo du Service Communication de la Préfecture

 

Nous remercions les visiteurs qui auront fait le déplacement à cette occasion.

Détail du mois d’août : une Vierge de lait

Le détail du mois d’août vous présente une peinture sur bois du XVIe siècle d’un artiste anonyme sous l’influence du peintre flamand Hans Memling dont l’école fut active à Bruges dans la deuxième moitié du XVe siècle.

D’une facture nordique appuyée, mais néanmoins influencée par la manière italienne, on y voit ce qui est appelé une Vierge de Lait, c’est-à-dire la Vierge Marie présentant son sein à Jésus. L’anatomie étrange de Jésus est liée au fait qu’il y a pour les artistes de cette époque un dilemme car il est difficile de tendre à une représentation naturaliste d’un enfant quand celui-ci est l’incarnation divine : on a alors tendance à mêler des éléments de corps adultes et enfantins qui forment un ensemble composite. La Vierge présente une expression figée et presque déçue : c’est la manière de l’artiste pour suggérer la prescience de la Vierge, qui connait déjà par certains signes le destin de son fils.

Cette peinture provient des réserves du musée et vous sera dévoilée de manière exclusive à l’occasion de la visite guidée spéciale du 15 août, pour cela, rendez-vous à 14h ou 15h30 au musée pour partir à la découverte des représentations de la Vierge dans les Collections !

Visite spéciale 15 août

A l’occasion du 15 août 2019, le musée Jeanne d’Aboville ouvrira ses portes avec des horaires légèrement décalés, puisqu’il sera ouvert de 13h à 17h.
C’est aussi l’occasion pour le public de découvrir la collection sous un angle original en suivant la visite guidée consacrée à l’iconographie de la Vierge Marie dans les collections à l’occasion de la fête de l’Assomption.

Vous découvrirez différents épisodes de la vie de Marie au gré des tableaux présentés et les éléments symboliques rattachés à la figure de la Vierge à travers le Temps dans l’Art. Le guide du musée vous proposera également à cette occasion de découvrir plusieurs tableaux inédits des réserves, présentées exceptionnellement dans le cadre de cette visite.

La visite guidée aura lieu deux fois l’après-midi, à 14h puis à 15h30. D’une durée d’une demi-heure environ, elle vous laissera ensuite le temps d’explorer le reste de l’impressionnante collection de la comtesse d’Héricourt.

En bref
Visite guidée thématique L’iconographie de la Vierge dans la collection du musée Jeanne d’Aboville
Mercredi 15 août à 14h et 15h30, durée : 30mn environ
Musée ouvert de 13h à 17h.
Tarif : entrée du musée à 4€, pas de suppléments pour la visite

 

Programme estival du musée

C’est l’été au musée et les collections seront encore mises en valeur via diverses animations, destinées autant aux populations locales qu’au public touristique !
Outre les incontournables visites estivales du samedi « A la découverte de la collection de la comtesse d’Héricourt », le musée vous propose une animation tout à fait inédite, sous la forme d’un jeu de piste de type escape-game. Une manière originale de découvrir ou redécouvrir la collection en réalisant une enquête sur la disparition mystérieuse du Conservateur du musée.

Ces différentes activités sont à découvrir ci-dessous :

La visite guidée
“A la découverte de la Collection de la comtesse d’Héricourt”

Les guides du musée vous proposent de partir à la découverte de la collection de peinture exceptionnelle et unique en son genre de la Comtesse d’Héricourt. Ce sera l’occasion de découvrir de manière approfondie ses œuvres majeures et de les replacer dans leur contexte de création pour en comprendre les symboliques, souvent oubliées…

Infos pratiques
À 14h30 les samedis 22 juin, 29 juin, 6 juillet, 13 juillet, 20 juillet, 27 juillet, 3 août, 10 août, 17 août, 24 août, et 7 septembre 2019 (d’autres dates sont possibles pour les groupes sur réservation).
Durée : environ 1h30, tarif : 4€
Réservation possible auprès du musée par téléphone au 03 23 56 71 91

 

Escape Game
“Jeanne d’Aboville Code : Disparition mystérieuse au musée”


Les visiteurs sont invités cet été à se transformer en enquêteurs pour découvrir l’origine de la disparition mystérieuse du Conservateur du musée en explorant son bureau à la recherche d’indices. Durant ce jeu de piste, ils seront amenés à explorer les Collections pour trouver des réponses qui leurs permettront de résoudre l’enquête.

Infos pratiques

Du 1er juillet au 8 septembre aux horaires d’ouverture du musée.

Le jeu pourra s’effectuer en solo ou par groupe jusqu’à 4 personnes.

Durée : une heure, tarif 4€.

Réservation de créneaux possibles.

 

 

Attention aux fermetures estivales !

Le musée sera exceptionnellement fermé le 14 juillet, les 22, 23 et 31 août, ainsi que le 1er septembre.

Un goût de Grand Siècle avec Bon Boullogne

Cette semaine est revenu de l’atelier de la restauratrice Florence Adam un très beau tableau mythologique, attribué au peintre Bon Boullogne.

Le tableau avant et après restauration

Bon Boullogne, dit Boullogne l’aîné, (Paris,1649 – 1717), est un peintre et graveur français qui travailla pour le roi Louis XIV. D’abord élève de son père, Bon Boullogne montra de bonne heure de grandes dispositions pour la peinture et remporta le Premier prix de Rome en 1669. Boullogne demeura cinq ans à Rome, où il réalisa surtout des copies d’œuvres célèbres, en particulier quelques fresques de Raphael destinées à être reproduites en tapisseries aux Gobelins. Il eut, par la suite, l’occasion de tromper avec ses imitations, les plus habiles connaisseurs.

Sa peinture est marquée pour le goût pour le thème de la mythologie, comme notre oeuvre en témoigne. Néanmoins nous n’avons pas pour le moment identifié totalement l’épisode représenté même si plusieurs symboles donnent quelques pistes.

La déesse, placée en majesté au centre du tableau, est sans doute une représentation de la déesse Cybèle, divinité d’origine phrygienne adoptée par les Grecs et les Romains, personnifiant la nature sauvage. On l’identifie grâce au lion couché qui garde son trône : selon les mythes, il symbolise le fait que la déesse fut abandonnée à la naissance et recueillie par  un lion ou bien évoque l’épisode d’Atalante et d’Hippomène, héros grecs punis pour avoir copulé dans son temple, qui furent transformés en fauves. Cybèle est la protectrice des enfants et des animaux sauvages, qui animent le premier plan du tableau.

Cybèle dispose des clés de la terre donnant accès à toutes les richesses et elle est souvent représentée accompagnée par des allégories de saisons dans la peinture de la période moderne. On peut donc penser que les divinités présentées autour d’elle sur ce tableau ont également cette fonction :

  • La femme à gauche, visiblement la déesse Cérès, que l’on représente souvent avec une faucille à la main, est assise sur une botte d’épis fraîchement coupés : elle symbolise l’été et la saison des moissons. Cérès est d’ailleurs la déesse de l’agriculture, des moissons et de la fertilité. Elle est associée à la déesse grecque Déméter.

  • Une autre femme est présentée à droite, une guirlande de fleurs sur les genoux : il s’agit sans doute d’une déesse rapprochée du Printemps, soit Flore, déesse de la floraison des fleurs, soit Perséphone (Proserpine pour les Romains), fille de Cérès, Déesse des saisons et de la germination des plantes.
  • Une figure féminine se trouve près du bord droit du tableau, moins éclairée que les deux précédentes : il s’agit vraisemblablement d’une évocation de l’automne, comme l’évoque la pomme qu’elle tient dans la main, fruit dont la récolte annonce la morte saison. On pourrait être tenté de la rapprocher de la déesse Discorde, célèbre pour sa “pomme de discorde”, mais il s’agit plutôt ici d’une évocation de Carpo, la déesse des fruits, fille de Flore et suivante de Perséphone.
  • Enfin l’un des personnages masculins derrière Cybèle pourrait symboliser l’Hiver. Pour le premier derrière la déesse, on peut penser au dieu des Enfers Hadès (Pluton pour les Romains), mari de Perséphone. En effet, la déesse Perséphone se retire aux enfers pour l’hiver, ce qui pourrait expliquer le geste d’invite que semble faire le personnage masculin. Le deuxième personnage masculin est quand à lui plus facilement identifiable avec sa couronne de vigne et sa peau de bête : il s’agit de Dionysos (Bacchus pour les Romains) qui symbolise peut-être la renaissance prédite après l’hiver car il a connu la mort et la renaissance : son mythe est parfois vu comme une allégorie des saisons en tant que héros qui meurt et renaît périodiquement.

Cette lecture de l’oeuvre reste néanmoins hypothétique car la taille de la toile a été modifiée après son achèvement. On peut voir sur la gauche un personnage incomplet, tenant une coupe et un thyrse (bâton entouré de vigne et de lierre et surmonté d’une pomme de pin) qui renvoie à Dionysos également.

 

Vous pourrez venir le redécouvrir au musée dans quelques semaines en section française quand il sera ré-encadré, pour vous faire votre propre idée sur l’interprétation mythologique qu’on pourrait en donner !

Détail du mois d’avril : les lapins de sainte Catherine

Ce détail provient d’un panneau intitulé le « Mariage mystique de sainte Catherine », peint par Girolamo da Santa Croce (Santacroce, 1480 – Venise 1556).

Peintre du XVIe siècle, Girolamo fut un élève de Giovanni Bellini par lequel il acquit la maitrise du style Renaissance. S’il travailla principalement dans et autour de Venise, on trouve également trace de son œuvre en Dalmatie, notamment un retable situé à l’église paroissiale de Blato (Croatie).

Le détail choisi ici est un couple de lapins. C’est un symbole plutôt ambivalent même s’il est courant de voir un lapin blanc représenté près de la Vierge, car c’est un des symboles de pureté mariale. La proximité d’un autre animal suggère la fécondité, le lapin étant très prolifique. Le lapin blanc est aussi considéré comme apte à se reproduire seul sans fornication, à l’image de la Vierge et personnifie la victoire de la pureté sur la passion.

La symbolique du lapin est néanmoins plus ancienne, il est par exemple un des emblèmes de Vénus, et on l’associe à la lascivité et la libération des instincts. On retrouve des lapins sur certaines représentations chrétiennes pour symboliser le combat des Saints contre la tentation charnelle.

De manière plus légère, le lapin est bien sûr un représentant de la fête de Pâques, et le musée vous convie à venir découvrir ces lapins et quelques autres lors de l’animation « Les lapins de Pâques envahissent le musée » pour remporter des chocolats le weekend du 20, 21 et 22 avril !