Détail du mois d’août : Vierge, palmier et miracle…

Le détail du mois d’août est extrait de la Fuite en Egypte produite par un artiste flamand du XVIIe siècle. Cette œuvre est rapprochée du style de l’anversois Abraham Govaerts (1589-1626), un spécialiste des vues de forêt, qui aurait pu être secondé par un autre artiste, Pieter van Avont (1600-1652), qui réalisait souvent les figures sur ses tableaux. La présence de nombreux anges et putti (anges enfantins) sur le tableau renforce cette hypothèse.

Le tableau représente la Sainte Famille se reposant durant la Fuite en Egypte, épisode cité dans l’évangile de Mathieu, où Joseph fuit avec Marie et Jésus en Egypte pour que Jésus échappe au Massacre des Innocents. La Sainte Famille est souvent représentée durant une halte sur le parcours vers l’Egypte, se reposant à l’ombre des arbres. Des anecdotes de nature apocryphes, c’est à dire ne faisant pas partie du canon officiel, sont ajoutées avec par exemple la présence d’un arbre fruitier visible au-dessus de la Sainte Famille qui fait référence au « Miracle du palmier ». Selon la tradition, durant la fuite en Egypte, la Vierge désirait manger les fruits d’un palmier sous lequel elle était assise mais les fruits étaient trop haut. Alors le Christ ordonna au palmier de se courber pour permettre à sa mère de se nourrir, ce qu’il fit. Une fois les fruits cueillis, le Christ ordonna au palmier de se redresser et lui promit une place au Paradis de son père. Le palmier obtempéra et d’entre ses racines surgit une source d’eau claire et fraîche.

Ce tableau des réserves sera présenté exceptionnellement dans le cadre des visites de l’Assomption les 16, 17 et 18 août prochains à 14h30. La réservation est recommandée.

Retour d’exposition pour des tableaux des collections

Trois tableaux présentés  au Musée Benoît-De-Puydt de Bailleul pour l’exposition Magies Baroques ont fait leur retour au musée cette semaine.

Vous pouvez d’ores et déjà redécouvrir à partir de lundi  :

Vanité de Coenraet van Roepel
Roger délivrant Angélique de Filippo Napoletano

 

Concernant le paysage de ruines d’un suiveur de Bartholomeus Breenbergh, il est retourné en réserves mais sera bientôt visible dans un nouvel accrochage, patience !

Paysage avec ruines, suiveur de Breenbergh
Photo Franck Boucourt

Détail du mois de mars : peintre précieux, gros livre et vieille dame…

Le détail du mois de mars vous présente un intéressant petit panneau, intitulé « Intérieur hollandais avec vieille femme lisant » de Jacob van Spreeuwen. Né à Leyde vers 1609 ou 1610, Jacob van Spreeuwen y travaille toute sa vie. Ses derniers tableaux connus datent de 1658, la date de sa mort est incertaine.
L’influence du peintre Gerard Dou semble par contre essentielle dans sa production de scènes de genre dans le style des fijnschilders. Les Fijnschilders, parfois traduit en français par peintres précieux, sont les artistes hollandais qui, entre 1630 et 1710, se sont employés à représenter la réalité avec un maximum de précision.
La scène représente une femme assise sur une chaise basse qu’on trouvait généralement à proximité d’une cheminée pour en exploiter la chaleur. Le gros livre qu’elle tient sur ses genoux est sans doute un livre religieux même si les Hollandais avaient accès à d’autres lectures. Les femmes hollandaises sont alors parmi les plus lettrées d’Europe et même les filles des classes les moins aisées peuvent accéder à l’école, la maitrise des lettres et des chiffres étant nécessaire pour nombre de métiers exercés dans les Pays-Bas septentrionaux.
Si l’éducation a des vertus d’émancipation, le tableau est néanmoins nuancé par la présence, à l’arrière de la chaise, du rouet symbole du travail domestique féminin au sein des maisons.

Vous pourrez découvrir ce tableau des réserves durant la visite « les Femmes du musée » consacrée à l’iconographie féminine au sein des collections le 8 mars prochain. Petit bonus, cette visite est gratuite pour les femmes !

Une tabagie

Ce tableau est décrit comme un Intérieur de taverne du XVIIe siècle, peint par un peintre flamand anonyme, qui gravitait sans doute autour de l’atelier bruxellois de David Teniers le Jeune (1610-1690). En effet, Tenier est le plus connu des peintres de genre de son époque, il a particulièrement développé le genre paysan, dont les scènes de taverne, créant de véritable recettes de composition que les autres peintres appliquaient.
Dans ces scènes de taverne on peut voir des hommes buvant, jouant et fumant, renvoyant au rôle éminemment social du tabac à cette époque : il est déjà source de polémique et soulève des problématiques qui nous sont totalement contemporaines.
L’herbe à Nicot, du nom de l’ambassadeur qui introduisit le tabac en Europe, était connue au Pays-Bas en qualité de plante médicinale dès la fin du XVIe siècle. On prit l’habitude dans priser et d’en fumer les feuilles assez rapidement et cette pratique avait gagné toutes les couches de la population des Pays-Bas avant 1625. Associés aux boissons dans les tavernes, les fumeurs sont assimilés au buveur d’alcool, on utilise alors l’expression boire une pipe de fumée.
Le tabac à priser devient très courant, accessible même aux couches les plus pauvres de la population. D’abord vendu par les apothicaires, il devient l’objet d’un commerce spécialisé. Les aubergistes en tenaient dépôt pour leurs clients.
On fume le tabac à l’aide de longues pipes de terre cuite au fourneau étroit. Plus rarement on utilise des pipes en argent, qui produisent une fumée âcre, comme sur notre tableau. Il existait dans les seuls Pays-Bas du Nord une dizaine de fabrique de pipes, les plus illustres était celles de Gouda.


Le tabac connait alors un tel succès qu’on cherche à limiter les endroits où fumer, car seules les églises y échappent. Les princes et les villes ont frappé de lourdes taxes le commerce du tabac et organisent des campagnes d’affichage pour mettre la population en garde. Seules les dames de la noblesse et de la grande bourgeoisie répugnent  à cette pratique, jugée malpropre. On a même trace de contrat de mariage entre deux nobles ou l’épousée introduit une clause interdisant à son mari de fumer dans la maison.
On commence alors à associer le tabac à la vie dissolue menée par les messieurs qui vont fumer dans des tavernes appeler tabagies, où l’on jouait et buvait. Le tabac devient alors un signe de rébellion et de débauche.

L’usage du tabac est encore largement répandu dans le monde,  aujourd’hui 13% des décès en France sont imputables au tabac.

 

Détail du mois de novembre : Attribution traditionnelle, boeuf et mugissement…

Le détail du mois de novembre vous présente un inédit des réserves ayant repris place dans les collections permanentes à l’occasion d’une rotation des collections. Il s’agit du « Bœuf et autres animaux ».
Ce tableau est attribué traditionnellement à Jan Kobell, un peintre d’Utrecht qui a pris Paul Potter pour modèle, acquérant son talent pour le travail animalier et paysager. On parle d’attribution traditionnelle car celle-ci est aujourd’hui remise en cause par les historiens de l’art : en effet, les pièces de bétails de Kobell étaient réputées pour la précision de leur dessin, ici la technique picturale est différente, très grasse et composée d’empâtements, notamment sur le museau du taureau, et semble bien éloignée du fini des oeuvres de Kobell… Les spécialistes n’ayant pas d’autre attribution à proposer dans l’immédiat, l’attribution ancienne demeure, même si on la sait douteuse.
La recherche manifeste de naturalisme de l’artiste, qui cherche à rendre le mouvement du bœuf, en plein mugissement, contribue à rendre cette œuvre vivante. Cette recherche apparaît encore dans le travail des artistes d’aujourd’hui, comme Steeven Labeau dont vous pouvez découvrir l’exposition la Nature source d’inspiration au musée jusque mars !

Mathias Withoos de retour au musée

Après un périple l’ayant conduit au museum Flehite d’Amersfoort, ville natale du peintre Mathias Withoos, le tableau Mors Omnia Vincit est de retour au musée !

Mors omnia vincit de Mathias Withoos

 

Pour en découvrir plus sur le tableau, vous pouvez télécharger l’article qui lui a été consacré à l’occasion de l’exposition en cliquant sur l’image ci dessous !

Détail du mois de septembre 2022 : artiste voyageur, dieu-fleuve et capridé…

Le détail du mois de septembre provient d’une huile sur toile intitulée Animaux à la fontaine. Œuvre d’Hendrick Mommers (Haarlem vers 1623 – Amsterdam, 1693), elle est caractéristique de la production de ce peintre de paysages méditerranéens. Il a probablement fait un voyage à Paris vers 1666-1668 puisque plusieurs vues du Palais du Louvre depuis le Pont Neuf lui sont attribuées. Mommers réalise principalement des paysages italianisants, c’est-à-dire des vues inspirées de l’ambiance méditerranéenne que les peintres nordiques en voyage rencontrent en Italie. Cette production se caractérise par le traitement doré de la lumière et ses représentations bucoliques.

La fontaine est ornée d’un dieu-fleuve, une statue allégorique représentant sous des traits humains un cours d’eau. Cette sculpture rappelle l’intérêt de l’artiste pour l’insertion de détails antiquisants. Le style largement esquissé des personnages, l’attention au rendu naturaliste des animaux et l’usage de la lumière du sud sont tout à fait caractéristiques de Mommers.

Pour découvrir l’œuvre entière, il faudra vous rendre à la Sous-Préfecture de Soissons à l’occasion des Journées Européennes du Patrimoine où elle sera exceptionnellement exposée en compagnie d’une sélection d’œuvres des collections du musée ! Rendez-vous les 17 et 18 septembre 2022 !

Bonne fête aux Hélène !

PHOTO FRANCK BOUCOURT

Bonne fête aux Hélène ! A cette occasion, on vous propose de découvrir cette jolie copie de l’Enlèvement d’Hélène par Lubin Baugin (1612, Pithiviers – 1663, Paris), dont l’original est visible au musée des Beaux-Arts de Dijon.
Hélène était la fille de Léda et de Zeus. Son époux se nommait Ménélas. Hélène émut le coeur de Pâris, prince de Troie. Il l’enleva. Les Grecs décidèrent de venger l’affront des Troyens et la longue guerre de Troie allait commencer. L’œuvre représente le moment de l’enlèvement d’Hélène, contrainte à monter dans un bateau à destination de Troie par Pâris.
Si dans le récit original Hélène cède facilement à Pâris, l’Occident médiéval va dans ses réécritures déculpabiliser Hélène et présenter qu’elle a bel et bien été enlevée. Ces mêmes récits ont sans doute influencé la réalisation de cet enlèvement, mettant en valeur la jeune femme comme figure centrale, celle par qui le récit commence….

Détail du mois d’août : savant, fraise et manches interchangeables…

Le détail du mois d’août provient d’une œuvre inédite des réserves, une petite toile flamande du XVIIe siècle représentant la réunion de trois savants. On y voit l’un des trois intellectuels écoutant le débat qui occupent ses deux comparses, un rouleau de parchemin posé devant lui.
Ce personnage porte un costume qui va devenir l’uniforme de l’intellectuel au fil du temps, jusqu’à la caricature avec les médecins vêtus de noir des pièces de Molière. En effet, le noir devient à la Renaissance une couleur recherchée car elle est d’abord adoptée par les princes espagnols qui l’utilisent à des fins de propagande pour affirmer leur autorité par un rigorisme non dénué de luxe. Elle est ensuite utilisée dans les autres cours d’Europe avant de se diffuser à la bourgeoisie et aux cercles intellectuels humanistes. Si le savant représenté porte un costume noir, on peut voir que les manches de son vêtement sont d’une autre couleur, car à l’époque, les manches sont interchangeables et peuvent être rajoutées par des système de lacet ou cousues directement en fonction des besoins. Il peut s’agir également d’un pourpoint porté en dessous et dépassant d’une manche fendue.
Le chapeau qu’il porte est à la mode à la fin du XVIe siècle, il est sans doute réalisé en velours ou en brocard. Sobre, il ne comporte ni bijou ni aigrette contrairement à un chapeau de cour. Mais l’élément le plus caractéristique ici est sans doute la fraise : apparue dans la seconde moitié du XVIème siècle, ce nouveau type de col va être très à la mode dans les cours et se diffuser dans la bourgeoisie. La mode pour cet accessoire évolue rapidement et la forme visible ici est relativement sobre par son aspect et sa taille, loin de celles visibles sous Henri III, qui atteignent jusqu’à 40cm !
Ce tableau sera exceptionnellement présenté au musée durant le mois d’août, venez l’admirer ! Pour en découvrir plus sur le vêtement et sa représentation dans les peintures, rendez-vous les 13, 20 et 27 août à 14h30 pour « la Fashion Visit’ » ! Attention c’est uniquement sur réservation !

Retour de restauration pour la chasse au canards

Le musée a eu le plaisir d’accueillir la restauratrice Marie-Paule Barrat venue ramener une oeuvre d’un artiste rare du Siècle d’Or : Louwijs Aernouts Elsevier
(Leyde, 1617/1618 – Delft, 1675). Louwijs Aernouts Elsevier est formé par son père, Aernout Elsevier, peintre mais aussi marchand d’art et tenancier d’une auberge leydoise fréquentée par des artistes tels que Jan van Goyen, Jan van de Velde, Jacob Pynas ou Johannes Torrentius.

Comme son père, il devait aussi exercer le métier de marchand d’art. On ne connait qu’un nombre très restreint de tableaux d’Elsiever et ceux-là, fait rare, appartiennent à des genres de peinture très variés, de la nature morte de gibier à la scène de genre en passant par le paysage mais aussi un intérieur d’église. Peu de peintures ont survécu jusqu’à nous, on en dénombre  quatre attribués dans le monde.

La chasse aux canards avant restauration

Le tableau du musée de La Fère est l’un des trois paysages connus de sa main et représente une chasse aux canards, une iconographie répandue dans les Pays-Bas septentrionaux. Le paysage de La Fère
présente de nombreuses similitudes tant iconographiques que
stylistiques avec une autre chasse aux canards d’Elsevier : celui du musée de Dessau en Allemagne.

Tableau similaire visible à Dessau, reproduit avec l’aimable autorisation de Mischa Steidl, droits réservés

Ce tableau de La Fère a fait l’objet d’une restauration importante car il avait fait l’objet par le passé de nombreuses retouches de sa couche picturale. Maire-Paule Barrat a procédé à la suppression des vernis et au retrait d’une partie de ses repeints pour mettre à nu les lacunes. Ses lacunes ont été reprises ensuite après un contrôle du support examiné par Juliette Mertens, restauratrice des tableaux sur bois qui a verifié les taquets retenant les planches entre elles et adapté le cadre.

La chasse aux canards, après restauration

Vous pouvez le redécouvrir dès aujourd’hui dans l’exposition permanente en salle Siècle d’Or.

Vous pouvez découvrir le déballage du tableau sur le compte tiktok du musée en cliquant ici.

Merci à Éléonore Dérisson pour l’apport scientifique à cet article.