Détail du mois de janvier : martyre, fils de et modello…

 

Le détail du mois de janvier vous présente un tableau important des collections italiennes, représentant le martyre de Sainte Afre. Ce tableau est l’œuvre de Carlo Caliari (1570-1596), surnommé Carletto, dont l’œuvre n’est pas forcément très familière du grand public à cause de sa courte carrière, et également par le fait qu’il resta dans l’ombre de son père, le célèbre Paolo Caliari, plus connu comme Véronèse.

Le tableau représente Sainte Afre avant son martyr : païenne convertie au Christianisme, elle refuse de sacrifier aux dieux et connaît le martyr sous Dioclétien. Elle est représentée entraînée sur l’échafaud où elle sera décapitée à la suite des Chrétiens qui l’ont converti, comme en témoigne l’épée posée à gauche, dont la forme crucifère renvoie également au martyr.

La couleur rougeâtre du tableau est liée à sa principale caractéristique : il s’agit d’un modello, c’est-à-dire une étude préparatoire destinée à préparer la version finale. Ce travail non-achevé n’a pas pour vocation de quitter l’atelier et le peintre a utilisé une couche de pigment assez fine laissant paraître à de nombreux endroits la sous couche préparatoire de couleur rouge. La version définitive du tableau peinte par Paul Véronèse en personne se trouve aujourd’hui dans l’église Saint-Euphémie de la ville de Brescia en Italie.

Pour découvrir ce tableau dans son intégralité, rendez-vous au musée en salle vénitienne !

Détail du mois de septembre 2022 : artiste voyageur, dieu-fleuve et capridé…

Le détail du mois de septembre provient d’une huile sur toile intitulée Animaux à la fontaine. Œuvre d’Hendrick Mommers (Haarlem vers 1623 – Amsterdam, 1693), elle est caractéristique de la production de ce peintre de paysages méditerranéens. Il a probablement fait un voyage à Paris vers 1666-1668 puisque plusieurs vues du Palais du Louvre depuis le Pont Neuf lui sont attribuées. Mommers réalise principalement des paysages italianisants, c’est-à-dire des vues inspirées de l’ambiance méditerranéenne que les peintres nordiques en voyage rencontrent en Italie. Cette production se caractérise par le traitement doré de la lumière et ses représentations bucoliques.

La fontaine est ornée d’un dieu-fleuve, une statue allégorique représentant sous des traits humains un cours d’eau. Cette sculpture rappelle l’intérêt de l’artiste pour l’insertion de détails antiquisants. Le style largement esquissé des personnages, l’attention au rendu naturaliste des animaux et l’usage de la lumière du sud sont tout à fait caractéristiques de Mommers.

Pour découvrir l’œuvre entière, il faudra vous rendre à la Sous-Préfecture de Soissons à l’occasion des Journées Européennes du Patrimoine où elle sera exceptionnellement exposée en compagnie d’une sélection d’œuvres des collections du musée ! Rendez-vous les 17 et 18 septembre 2022 !

Détail du mois d’avril : roseau, Passion et mains…

Le détail du mois vous présente une copie sur bois d’Ecce homo, œuvre de Andrea Solario (1460 – 1524), sans doute exécutée par un artiste nordique du XVIe siècle. Si l’original se trouve au musée des Beaux-arts de Leipzig, d’autres copies, très proches de notre version sont visibles au musée de Dijon et au musée du Louvre.

Ecce homo est une expression latine signifiant « voici l’homme » qu’aurait employé Ponce Pilate pour désigner Jésus lorsque celui-ci est présenté à la foule, après sa flagellation. Il est alors représenté avec une cape, la couronne d’épine et un sceptre de roseau pour singer des attributs royaux, d’où provient la dénomination également de Christ au roseau.
L’utilisation d’un roseau n’est pas anodine car il renvoie à la présence de Dieu, et le bruissement du vent sur la végétation en était une manifestation auditive. C’est également un des outils de la Passion du Christ car les soldats romains le frappent avec ce sceptre dérisoire. La Passion est également évoquée par les traces laissées par la flagellation et les liens qui entravent Jésus.
Le Christ au roseau a été beaucoup représenté par les artistes de la Renaissance qui ont cherché à fixer une expression de tristesse et de renoncement, également perceptible par le langage corporel : les mains entravées figurent l’abattement.

Ce tableau, provenant des réserves, sera présenté exceptionnellement au mois d’avril, venez le découvrir !

Bon voyage Marie-Madeleine !

Madeleine en prière, Jan Massys
MJA 336 bois, 91 x 73

La somptueuse Madeleine repentante de Jan Massys est partie hier pour le musée San Domenico de Forli (Italie) pour l’exposition Marie-Madeleine, le mystère et l’image, du 27 mars au 10 juillet 2022 (MADDALENA. IL MISTERO E L’IMMAGINE).

Représentant flamand du courant maniériste à tendance fortement italianisante, Jan Massys dévoile ici son goût pour les visages de madones italiennes et l’influence de l’école de Fontainebleau par la solidité du corps.

Travaillant à Anvers dans l’atelier de son père Quentin Massys, il fut accusé d’hérésie et banni comme protestant en 1544. Il voyagea alors en Italie et en France pour ne revenir à Anvers qu’en 1558.

Ses thèmes de prédilection sont les peintures religieuses et mythologiques. Ici il représente Marie Madeleine lisant les Saintes Ecritures, elle est reconnaissable à ses attributs traditionnels, le pot de parfum qu’elle a déversé sur les pieds du Christ et la fleur de muguet, symbole de modestie. Les coloris sont éminemment nordiques par la gamme de bruns et de bleus qui rappelle la production de Joachim Patinier, alter ego de Durër en Flandre.

Il y a 316 ans, la mort d’un Maître du Baroque

Il y a 316 ans jour pour jour nous quittait Cosimo Ulivelli (1625-1705), à Santa Maria a Monte, un petit village à côté de Pise.

Cosimo Ulivelli, élève du pisan Volterrano, réalise une grande partie de sa carrière à Florence. Peintre très actif en son temps et spécialiste du Baroque, on lui doit des décors de fresques d’églises florentines, comme le cycle des Sept Œuvres de miséricorde à l’Oratorio dei Santi Jacopo e Filippo. Il avait également participé à la décoration du plafond de la troisième galerie des Offices.

ACMHDF/FRANCK BOUCOURT

Le musée Jeanne d’Aboville possède de sa main un intéressant Enlèvement de Chloris. Les compositions mythologiques d’Ulivelli sont aujourd’hui plutôt rares, mais présentent, à l’image de cet enlèvement, un dynamisme renforcé par les lignes serpentines et les torsions montrant l’héritage de l’élégant maniérisme florentin du siècle précédent. Chloris, nymphe d’une grande beauté est emportée sur l’Olympe par le dieu Zéphyr, personnification du Vent d’Ouest. Elle devient son épouse et reçoit en cadeau de mariage le pouvoir de contrôler la floraison des fleurs du printemps. C’est alors que, devenue déesse, elle aurait pris le nom de Flore.

Ce tableau possède un exemplaire jumeau également de la main d’Ulivelli que vous pouvez retrouver au musée des Beaux-Arts de Dole. Les pigments mieux conservés de cette version montre que la robe de Chloris était rose…

Détail du mois de mai : 400e anniversaire, pyramide et bergère…

Le détail du mois est l’œuvre d’un artiste dont nous fêtons cette année le quadri-centenaire de la naissance : Jan Baptist Weenix (Amsterdam, 1621 – De Haar vers 1659/1661). Fils d’un architecte, Jan Baptist Weenix suit un apprentissage auprès du peintre Jan Christiaensz. Micker. Il se rend en Italie en 1643 où il travaille pour de grands commanditaires comme Giovani Battista Pamphili, le futur pape Innocent X. Après son retour aux Pays Bas vers 1647, il s’établit à Amsterdam puis Utrecht où il devient célèbre pour ses paysages fortement marqués par son voyage italien.

Le détail du mois s’inscrit dans cette veine italianisante et presque nostalgique avec une vue imaginaire mêlant divers monuments romains appréciés des peintres du XVIIe siècle. Le château Saint-Ange, dont la forme ronde est reconnaissable, et la pyramide de Cestius, un monument funéraire situé à Rome près de la porta San Paolo, un des édifices romains les mieux conservés à l’époque. Une bergère vient animer l’ensemble, surveillant des animaux, qui sont toujours présent dans les paysages de Weenix.

Ce détail vous a donné envie d’escapade italienne ? On vous donne rendez-vous, sous réserve de faisabilité bien sûr, le 29 mai 2021 à 17h pour On dirait le Sud, une conférence consacrée aux voyages italiens des peintres hollandais par l’historienne de l’art Eléonore Dérisson.

Et si on vous conviait à une promenade en Italie?

On dirait le Sud

L’Italie vue par les peintres hollandais dans les Collections du musée Jeanne d’Aboville

Conférence animée par Eléonore Dérisson

 

A l’occasion du 400e anniversaire de la naissance de Jan-Baptist Weenix, célèbre peintre hollandais de paysages italianisants dont le musée conserve un tableau, Eléonore Dérisson propose une conférence autour des œuvres néerlandaises de la collection inspirées par l’Italie. A partir de la Renaissance, ce pays apparait comme l’épicentre de la culture européenne et de nombreux artistes de l’école hollandaise s’y rendent pour s’inspirer des ruines antiques ou copier les grands maîtres, tandis que d’autres représentent dans leurs tableaux une Italie rêvée, sans jamais quitter les Pays-Bas. La conférence sera l’occasion de revenir sur les apports de ces voyages et leurs influences variées sur les thèmes et styles mis en œuvre par les artistes nordiques. Entre lumière méditerranéenne et évocations de la Rome antique, la peinture hollandaise a su réinventer l’art du paysage idyllique et pittoresque.

Eléonore Dérisson est historienne de l’art, chargée des collections à la Fondation des Artistes et spécialiste de la peinture hollandaise.

 

En bref :

La conférence se tiendra à l’espace Drouot, rue des Bigors à La Fère, le 29 mai 2021 à 17h.

Ouverture des portes à 16h30.

L’entrée est libre dans la limite des places disponibles et le port du masque est obligatoire durant toute la durée de la conférence.

Joyeux anniversaire il Padovanino !

Il y a 433 ans, naissait à Padoue le petit Alessandro Varotari, connu plus tard sous son nom d’artiste Il Padovanino. Fils de l’architecte et peintre Dario Varotari l’Ancien, il fut l’élève de son père, qui s’occupa de la formation de Chiara Varotari (1584 – 1663), sa sœur elle aussi peintre. Il fut par la suite élève d’un disciple de Titien, Damiano Mazza, et les peintures de ses débuts montrent l’influence du Maitre vénitien.

En 1614, il emménage d’ailleurs à Venise, mais voyage également à Rome à deux reprises (vers le milieu de l’an 1610 et en 1625), où il a été souvent employé dans la production de copies de grands tableaux des artistes de la Renaissance classique. Son style influencé par le maniérisme tardif cherche néanmoins l’inspiration dans la gamme chromatique propre à la peinture vénitienne et annonce le baroque.

Portrait gravé d’Alessandro Varotari paru dans Het Gulden Cabinet de Cornelis de Bie (1662)

Le musée possède un joli exemple de la production de ce peintre : l’Allégorie de la Charité. Le sujet allégorique est ici rendu à l’essentiel par un cadrage très serré et une gamme de couleurs limitée. La figure féminine allaite un enfant en même temps qu’elle joue avec un autre, plus âgé et juché sur ses épaules. Loin des codes qui prévalent dans ce genre de scène, la Charité de Padovanino est une célébration prosaïque de l’amour filial, inspirée sans doute des exemples vus durant ses voyages, notamment à Rome. Il a traité à diverses reprises ce thème.

Il meurt à Venise en 1648, s’affirmant jusqu’au bout comme un continuateur du Titien.

L’œuvre est actuellement en dépôt à la Préfecture de l’Aisne.

Dernier détail du mois de l’année : Saint Jean et Jésus

Le détail du mois de décembre présente une œuvre plutôt rare, un tondo, que l’on doit à un peintre anonyme, connu sous le nom de maître du tondo Campana. Un tondo est un terme italien désignant une peinture de forme ronde, celui-ci représente la Sainte famille en adoration devant l’enfant Jésus.

Le maître du tondo Campana était a priori un peintre florentin, qui travailla dans l’atelier du Pérugin, célèbre artiste de la Renaissance, qui fut le maître de Raphaël. En effet, il est documenté que le Pérugin, alors à la mode, aurait loué un atelier, une bottega, à la fin du XVe siècle dans la ville de Florence, produisant principalement de la peinture dévotionnelle. 

Le tableau de La Fère illustre l’influence du Pérugin par sa manière douce et élégante, qui reprend des motifs mis au point par le chef de l’atelier.
Le détail vous dévoile une représentation de saint Jean-Baptiste, en adoration devant l’enfant Jésus. Jean-Baptiste est souvent représenté en compagnie de Jésus car la tradition en fait des cousins. Pour l’identifier, le peintre l’a vêtu de son habit d’ascète qui symbolise sa vie en tant qu’ermite, ainsi qu’un bâton crucifère renvoyant à la future crucifixion de Jésus dont Jean a eu la prémonition. Il faut aussi préciser que ce saint était fort populaire à Florence, puisqu’il était un des saints patrons de la ville.
Ce tableau, restauré en 2017, a fait l’objet au mois de novembre d’un nouveau système de fixation pour pouvoir être présenté au public dans de bonnes conditions. Vous pourrez bientôt le redécouvrir au musée Jeanne d’Aboville ! L’équipe vous souhaite une belle fin d’année.