Il y a 316 ans, la mort d’un Maître du Baroque

Il y a 316 ans jour pour jour nous quittait Cosimo Ulivelli (1625-1705), à Santa Maria a Monte, un petit village à côté de Pise.

Cosimo Ulivelli, élève du pisan Volterrano, réalise une grande partie de sa carrière à Florence. Peintre très actif en son temps et spécialiste du Baroque, on lui doit des décors de fresques d’églises florentines, comme le cycle des Sept Œuvres de miséricorde à l’Oratorio dei Santi Jacopo e Filippo. Il avait également participé à la décoration du plafond de la troisième galerie des Offices.

ACMHDF/FRANCK BOUCOURT

Le musée Jeanne d’Aboville possède de sa main un intéressant Enlèvement de Chloris. Les compositions mythologiques d’Ulivelli sont aujourd’hui plutôt rares, mais présentent, à l’image de cet enlèvement, un dynamisme renforcé par les lignes serpentines et les torsions montrant l’héritage de l’élégant maniérisme florentin du siècle précédent. Chloris, nymphe d’une grande beauté est emportée sur l’Olympe par le dieu Zéphyr, personnification du Vent d’Ouest. Elle devient son épouse et reçoit en cadeau de mariage le pouvoir de contrôler la floraison des fleurs du printemps. C’est alors que, devenue déesse, elle aurait pris le nom de Flore.

Ce tableau possède un exemplaire jumeau également de la main d’Ulivelli que vous pouvez retrouver au musée des Beaux-Arts de Dole. Les pigments mieux conservés de cette version montre que la robe de Chloris était rose…

Détail du mois de septembre : fruits, insectes et ex-taulard…

Le détail du mois de septembre vous invite à vous arrêter sur de petites choses pas forcément perceptibles au premier coup d’œil avec une nature morte de fruits, œuvre d’Ernst Stuven (vers 1657–1712). Né à Hambourg, Stuven s’installe à Amsterdam à dix-huit ans, où il fréquente plusieurs ateliers. Se dirigeant vers la peinture de fleurs, il rejoint l’atelier d’Abraham Mignon (1640-1679), grand spécialiste des natures mortes. Il est surtout célèbre pour avoir été emprisonné dans une maison de correction d’Amsterdam à cause de relations abusives avec un de ses apprentis, Willem Grasdorp. Après avoir déménagé à Rotterdam, il a trouvé un mécène qui le finança jusqu’à sa mort en 1712.

Notre détail représente des insectes attirés par de succulents fruits, ici une grappe de raisin noir et des pêches. Au XVIIe siècle, les raisins noirs étaient principalement importés depuis l’Espagne et le climat imposait de cultiver les pêches sous serres, ces deux fruits étaient donc luxueux, sinon rares. Les raisins montrent les premiers signes de décomposition et sont déjà la cible des insectes, évoquant le concept de la fugacité de la vie, au centre de la vanité.

Le carabe des bois et les fourmis qui courent sur les pêches sont représentés avec une grande minutie et témoigne du souci de naturalisme du peintre. Le plus souvent liés à l’idée de souillure les insectes ont une charge symbolique plutôt négative, ils symbolisent le mal qui peut s’immiscer partout.

Vous pouvez découvrir ce tableau et plusieurs autres dans l’exposition Instants Suspendus, regards sur la nature morte, et aller à la rencontre des insectes présents sur les toiles au Musée des papillons de Saint-Quentin. N’oubliez pas non plus la conférence sur la notion d’hospitalité qui sera présentée à la fin du mois par Alain Tapié à l’Espace Drouot de La Fère !

Journée de la bière : à la rencontre d’une scène de taverne…

En cette journée internationale de la Bière, on vous propose de découvrir cet inédit des réserves : il s’agit d’une scène de taverne, d’un artiste hollandais du XVIIe siècle, peut-être David Teniers le jeune, que nous avons déjà évoqué il y a quelques temps à propos d’une autre scène du même genre.


De très petite taille, 13 cm sur 11, cette scène présente les abords d’une taverne avec un buveur attablé à l’extérieur. Sans surprise la bière était une boisson très populaire en Flandre et en Hollande, elle fait même figure de boisson nationale. Durant le XVIIe siècle, si les riches apprécient le vin exporté, une grande partie de la population a pour seul breuvage la bière, parfois coupée d’eau. On en boit alors à tous les repas et en tout lieu. Il en existe deux sortes différentes, dites simple ou double, selon la teneur en alcool. La consommation est énorme, on en boit pas moins de 250 000 hectolitres dans les seules brasseries de Haarlem, produite bien sûr par la guilde locale.

Cette consommation importante de bière a laissé son empreinte dans le paysage avec l’excellente réputation des bières belges et hollandaises, le musée vous invite néanmoins à les consommer avec modération… 🙂

Détail du mois d’août : Vierge, faussaire et couronne…

Ne vous fiez pas à l’aspect vaguement médiéval du détail du mois d’août car il s’agit vraisemblablement de l’œuvre d’un faussaire allemand du XIXe siècle ! On parle alors de « faux » car il s’agit de faire passer ce tableau pour une œuvre ancienne et originale, et non pas un peintre imitateur cherchant à copier le style.
Il représente l’Adoration des Mages dans un style proche du Gothique international, une phase tardive de l’art gothique au XVe siècle, qui laissera peu à peu sa place au style Renaissance.

Le faussaire ici reprend les codes de ce style, notamment dans l’exaltation de la figure féminine, inspirée de l’esthétique courtoise. La Vierge y est représentée avec un grand front typique des critères aristocratiques de beauté médiévaux. Elle est également représentée avec une couronne, pour renvoyer à la tradition de la Vierge Marie, couronnée aux Cieux. Le thème est présent à partir du Moyen-Âge, mais ne fait pas l’objet d’un dogme reconnu par l’Église. Cette couronne, symbole de puissance, évoque à la fois le fait que Marie est choisie par Dieu et son lignage royal, car elle est une descendante du roi David. Cet accessoire implique que la Vierge, mère de Dieu, sans être elle-même divine, est placée par Dieu au-dessus de toutes les créatures, anges, démons et hommes.

Si la thématique de la Vierge vous intéresse, la Compagnie Hymnalaya vous propose deux lectures théâtrales de « Gaby, ou le pardon de Marie » au musée les 11 et 15 août à 15h30. Attention c’est uniquement sur réservation !

Une flotte sur le départ et un Flamand parmi les Hollandais…

Envie de bord de mer ? Nous fêtons aujourd’hui l’anniversaire d’un peintre qui lui consacré son œuvre : en effet, le 23 juillet 1614 naquit à Anvers Bonaventura Peeters, artiste baroque flamand qui est connu pour ses paysages maritimes.

Issu d’une famille d’artistes, il apprend auprès de son père, qui est maitre à Anvers et membre de la guilde de Saint-Luc, avec sa fratrie :  Jan Peeters I, Gillis Peeters, et Catharina Peeters qui furent également peintres. Il devient lui-même membre de la guilde de Saint-Luc en 1634 et peint avec son frère Gillis, une vue de la bataille de Calloo pour la municipalité d’Anvers qui veut célébrer la victoire de la couronne espagnole sur les Hollandais qui voulaient encercler la ville.

Ses premières œuvres illustrant des paysages sont influencées par l’école hollandaise qui détient alors un presque monopole de la peinture de marine. Il peint des naufrages sur des mers agitées et des vues plus calmes de l’Escaut et du littoral, d’une palette subtile et nuancée.

Un peu plus tard, ses œuvres sont marquées par les couleurs fortes et rappellent les tons propres au classicisme italien. Ce changement de style reflète la demande internationale croissante de paysages italianisants.

La peinture détenue par le musée Jeanne d’Aboville témoigne plutôt de cette deuxième période avec une impressionnante escadrille de bateaux qui séjourne à l’entrée d’un port. S’agit-il d’une flotte de guerre se préparant à l’assaut ou d’un plus lucratif départ en expédition commerciale ?  Les éléments présents n’ont pour le moment pas permis de le déterminer, car nous sommes dans le contexte de la Guerre de Quatre-vingt ans mais également dans un moment d’expansion commerciale important.

Bonaventure Peeters meurt le 25 juillet 1652 dans le village d’Hoboken (en Belgique) où il s’était retiré à cause de sa santé délicate, il n’avait que 38 ans. Son fils Bonaventura II devient également peintre de paysage, mais préfère les rivières et les canaux.

 

Envie d’en savoir plus sur la peinture de marine ? Retrouvez l’article de l’historienne de l’art Eléonore Dérisson consacré aux marines de la collection du musée en cliquant ici !

Une lecture théatrale pour l’Assomption

Après une première intervention en juin pour inaugurer l’ouverture de la nouvelle exposition Instants suspendus, la compagnie théâtrale professionnelle laonnoise Hymnalaya revient au musée Jeanne d’Aboville pour proposer cette fois une visite mêlant l’observation des peintures avec celle de la performance théâtrale. Ils proposeront deux représentations d’un ensemble d’extraits de leur pièce Gaby, ou le pardon de Marie, établissant quelques audacieuses correspondances avec les peintures des Collections à l’occasion de la fête de l’Assomption de la Vierge. Suite à cette heure théâtrale, le public sera invité à apprécier les nombreuses peintures religieuses du musée. En effet, la Vierge Marie est une figure importante dans l’iconographie, et elle est présente sur pas moins de 10% des tableaux du musée !
La compagnie Hymnalaya et ses deux acteurs Lucie Geloën et Bernard Namura porteront par la lecture théâtrale un regard inédit sur les collections, avec des passages écrits pour l’occasion. Un événement à ne rater au moins d’août pour les mordus de théâtre, les passionnés d’art ou les curieux qui ont envie de découvrir le musée autrement !

Les intervenants

droits réservés : Compagnie Hymnalaya

La Compagnie « Hymnalaya », avec son répertoire de théâtre à deux, une comédienne et un comédien, pouvant certes interpréter l’une et l’autre plusieurs personnages, signe sa démarche artistique, naturellement tournée vers la création permanente. La symbolique hymnalayenne relève d’une volonté des artistes de conjuguer dans leurs créations des thèmes d’une grande actualité, d’un indéniable universalisme et d’une non-moins incontestable spiritualité, le tout dans une simplicité n’excluant pas la virtuosité et dans une multitude de contextes se prêtant à cette trilogie permanente.
www.hymnalaya.fr

En bref :
11 et 15 août à 15h30 : visites théâtrales sur le thème de la Vierge Marie
Tarif : 5€
Réservation obligatoire auprès du musée au 03 23 56 71 91

Roestraten, un peintre et un orfèvre…

Il y a 321 ans nous quittait un grand peintre du Siècle d’or hollandais : Pieter Gerritsz van Roestraten.


Elève de Frans Hals dont il épousa la fille en 1654, il vécut à Harlem et Amsterdam avant de déménager à Londres à une date incertaine entre 1660 et 1666, où il sera grièvement blessé lors du grand incendie de la ville. On suppose qu’il a été présenté au roi Charles II par l’intermédiaire du peintre Peter Lely, un autre néerlandais, installé à Londres et spécialiste des portraits. Roestraten abandonna sa spécialité d’alors, les scènes de genre, pour se consacrer aux natures mortes, mettant en scène principalement des orfèvreries et des matières précieuses. Ces natures mortes d’apparat rencontrent un grand succès par le talent de Pieter Gerritsz van Roestraten à rendre les textures sur les métaux et les bijoux. Il va souvent représenter les mêmes objets en changeant seulement la composition pour mettre en exergue un aspect plutôt qu’un autre selon l’effet recherché.

Photo Franck Boucourt

Le musée possède de ce peintre une majestueuse nature morte aux orfèvreries qui montre ce goût pour les objets récurrents car le grand pot à couvercle en argent orné de mascarons et de décors végétaux travaillés au repoussé se retrouve comme sujet principal de deux autres natures mortes conservées au Rijksmuseum et au Victoria and Albert Museum de Londres. Pour découvrir l’œuvre laféroise du peintre, il faudra vous rendre à l’exposition du Musée de la Nacre de Méru « Coquillages, de la science au kitsch » visible jusqu’au 2 janvier 2022.
Roestraten meurt le 10 juillet 1700 et est enterré à Londres.

Un concours photo où présenter votre propre nature morte !

Dans le cadre de l’exposition Instants suspendus, les musées de La Fère et Saint-Quentin vous propose un concours photo ouvert à tous du 14 juin au 29 août 2021, pour vous permettre de faire partie d’une exposition consacrée à la nature morte, inaugurée à l’occasion des Journées du Patrimoine.

Pour participer, envoyez-nous votre plus belle nature morte photographique !  Attention, pour être reçue, votre participation devra obligatoirement contenir au moins une fleur et un aliment.

Retrouvez le règlement complet sur la page consacrée au concours .

Vous pouvez également télécharger le bulletin de participation ici. 

 

16 avril 1755, une portraitiste est née…

Le 16 avril 1755 naissait à Paris Louise-Élisabeth Vigée, fille de Louis Vigée, pastelliste, et promise à un grand avenir. Dès ses six ans, son talent précoce pour le dessin s’exprime : dans ses cahiers, sur les murs du couvent où elle reçoit son éducation. C’est à cette époque que Louis Vigée s’extasie un jour devant un dessin d’homme barbu de sa petite fille prodige. Il prophétise dès lors qu’elle sera peintre.

Louise Élisabeth Vigée Le Brun, Autoportrait de 1790 (Florence, Corridor de Vasari)

Après le décès de son père, Gabriel-François Doyen, ami de la famille encourage Elisabeth à persévérer dans le pastel et dans l’huile ; conseil qu’elle suivra et deviendra la plus grande portraitiste de son temps, souvent comparée à Quentin de La Tour ou Jean-Baptiste Greuze.

Son art et sa carrière exceptionnelle en font un témoin privilégié des bouleversements de la fin du XVIIIe siècle, de la Révolution Française et de la Restauration. Fervente royaliste, elle sera successivement peintre de la cour de France, de Marie-Antoinette et de Louis XVI, du Royaume de Naples, de la Cour de l’empereur de Vienne, de l’empereur de Russie et de la Restauration.

Le musée de La Fère possède un portrait réalisé par cette artiste, celui de Madame Adélaïde. Vous pouvez le retrouver sur youtube également.

Portrait de Madame Adélaide par Elisabeth Vigée-Lebrun

Des dix enfants de Louis XV, seulement deux ont survécu à la Révolution : ses filles Adélaïde et Victoire. Ce portrait d’Adelaïde (1732-1800) fut réalisé alors que celle-ci s’était exilée en Italie en 1791, rejoignant l’ancien palais de l’ambassadeur de France au Vatican.

Ce tableau à la fois sobre dans sa composition et rappelant des fastes royaux disparus par la finesse du rendu des étoffes témoigne de l’état d’esprit mélancolique qui devait sans doute habiter son modèle, qui mourra en exil quelques années plus tard à Trieste.

Élisabeth Vigée Le Brun meurt à Paris à son domicile de la rue Saint-Lazare le 30 mars 1842.

Joyeux anniversaire il Padovanino !

Il y a 433 ans, naissait à Padoue le petit Alessandro Varotari, connu plus tard sous son nom d’artiste Il Padovanino. Fils de l’architecte et peintre Dario Varotari l’Ancien, il fut l’élève de son père, qui s’occupa de la formation de Chiara Varotari (1584 – 1663), sa sœur elle aussi peintre. Il fut par la suite élève d’un disciple de Titien, Damiano Mazza, et les peintures de ses débuts montrent l’influence du Maitre vénitien.

En 1614, il emménage d’ailleurs à Venise, mais voyage également à Rome à deux reprises (vers le milieu de l’an 1610 et en 1625), où il a été souvent employé dans la production de copies de grands tableaux des artistes de la Renaissance classique. Son style influencé par le maniérisme tardif cherche néanmoins l’inspiration dans la gamme chromatique propre à la peinture vénitienne et annonce le baroque.

Portrait gravé d’Alessandro Varotari paru dans Het Gulden Cabinet de Cornelis de Bie (1662)

Le musée possède un joli exemple de la production de ce peintre : l’Allégorie de la Charité. Le sujet allégorique est ici rendu à l’essentiel par un cadrage très serré et une gamme de couleurs limitée. La figure féminine allaite un enfant en même temps qu’elle joue avec un autre, plus âgé et juché sur ses épaules. Loin des codes qui prévalent dans ce genre de scène, la Charité de Padovanino est une célébration prosaïque de l’amour filial, inspirée sans doute des exemples vus durant ses voyages, notamment à Rome. Il a traité à diverses reprises ce thème.

Il meurt à Venise en 1648, s’affirmant jusqu’au bout comme un continuateur du Titien.

L’œuvre est actuellement en dépôt à la Préfecture de l’Aisne.