Détail du mois de novembre : ange, phylactère et vaisselle flamande…

Le détail du mois provient d’un triptyque de la salle des Primitifs représentant sur son panneau central une adoration des Mages réalisée par l’atelier anversois de Pieter Coecke van Aelst, actif dans la première moitié du XVIe siècle. Notre détail provient du volet gauche représentant l’Annonciation.

On y voit la représentation de Gabriel, l’ange de l’Annonciation qui désigne le ciel et déploie un phylactère. Un phylactère est un moyen graphique semblable à une petite banderole, sur laquelle se déploient les paroles prononcées par le personnage dépeint, ici on peut y lire Ave gratia plena, dominus tecum, soit « Je te salue, pleine de grâces, le Seigneur est avec toi ». L’ange est somptueusement vêtu et paré car les peintures de l’atelier de Pieter Coecke van Aelst était célèbre pour leurs détails décoratifs d’une certaine préciosité.
A l’arrière-plan, on peut voir de la vaisselle d’étain posée sur une armoire, que l’on s’attend davantage à retrouver dans une maison bourgeoise des Flandres que dans l’habitat de Marie en Palestine, les peintres interprètent alors le décor des scènes bibliques avec une grande liberté et les scènes de l’annonciation sont généralement l’occasion d’expérimentation sur la profondeur avec des jeux de perspectives.

Ce tableau était parti en restauration et revient au cours du mois de novembre et vous aurez l’occasion de le redécouvrir nettoyé et consolidé. En effet, on peut voir une fissure qui court dans le bois et dont l’état a nécessité une intervention des restaurateurs. A bientôt au musée pour le voir en entier !

En ce jour de Toussaint…

Cette fête, comme son nom l’indique, est le jour où l’Église catholique honore tous les saints, connus et inconnus. La célébration de cette fête chrétienne au 1er novembre est une spécificité catholique apparue en Occident au VIIIe siècle. En effet, c’est à partir de cette période qu’elle est fêtée le 1er novembre, lorsque le pape Grégoire III dédicace à tous les saints une chapelle de la basilique Saint-Pierre de Rome.

C’est un jour de visite traditionnelle des cimetières car la Toussaint précède d’un jour la Commémoration de tous les fidèles défunts.

Ci-dessous on vous laisse découvrir le panneau central du triptyque du couronnement de la Vierge, qui présente de nombreux saintes et saints :

Organisé par cercle, vous trouvez au premier rang des personnages de l’Ancien Testament, ainsi que des Pères de l’Eglise, au deuxième rang les saintes et au troisième rang les saints. certains sont aisément reconnaissable à leurs attributs, comme Sainte Barbe, représentée avec la tour à trois fenêtres où elle fut enfermée :

Ou Saint André avec la croix caractéristique de son martyr :

 

Détail du mois d’octobre : Roi, chasse et lièvre…

Le détail du mois d’octobre est consacré à la représentation du roi sans doute le plus emblématique de l’histoire de France, Louis XIV ! Ici peint par l’atelier florissant d’Adam François van der Meulen (1632-1690), il témoigne du style baroque adopté par ce peintre, bruxellois d’origine mais entrée au service du roi de France en 1662. Spécialiste des chevaux et des paysages, il est célèbre pour ses scènes de chasse et de bataille : son talent est reconnu par le Roi en personne qui lui accorde une pension. Il accompagne Louis XIV dans tous ses voyages, dans toutes ses résidences, et dans toutes ses guerres.

Le détail ici présenté évoque un départ de chasse, Louis XIV est figuré sur un cheval blanc, vêtu d’un habit de chasse somptueux. La pratique de la chasse était alors un loisir réservé à la noblesse, qui en détenait le privilège. Le roi devait donc marquer son rang devant la cour en étant un chasseur assidu. Il s’agit alors de chasse à courre, et le roi va se déplacer accompagné d’un équipage de vénerie nombreux, pouvant atteindre trois-cents personnes ! On peut voir des nobles qui l’assistent à pied ou à cheval, à l’image du second cavalier sur le détail qui tient un lièvre par les pattes-arrières.

Pour découvrir cette œuvre magistrale en entier, une date à retenir : le 7 octobre prochain ! En effet le tableau sera dévoilé au public à l’issue de sa restauration lors de l’après-midi avec Louis XIV où restaurateurs et historiens vous en dévoileront tous les secrets !

Détail du mois : une abbaye, des nuages et beaucoup de talent…

Le détail du mois de septembre vous présente l’un des plus beaux paysages réalisés par Salomon Ruysdael (Naarden, vers 1600– Haarlem, 1670), un des grands maîtres de ce genre au XVIIe siècle. Spécialiste des paysages de rivières, d’estuaires ou de dunes, Salomon Ruysdael commence sa carrière à Haarlem et restera toute sa vie aux Pays-Bas. Oncle du célèbre Jacob van Ruisdael (Haarlem, 1628 – Amsterdam, 1682), il entreprend sa formation.

Ce détail est tout à fait typique de son style, avec les effets atmosphériques du ciel et le troupeau venant animer le paysage, mais il est surtout remarquable par la présence de ruines de deux édifices religieux. En effet, le bâtiment semi-détruit est identifié comme l’abbaye d’Egmond, ou abbaye Saint-Adalbert, un monastère bénédictin, situé en Hollande-Septentrionale. L’abbaye fut détruite en 1573, pendant la guerre des quatre-vingts ans qui voit les Hollandais lutter contre les Espagnols. L’abbaye sera laissée à l’état de ruines par les Gueux de mer, une milice hollandaise protestante de corsaires et d’aventuriers qui agit pour le compte de Guillaume d’Orange, le principal constructeur de l’indépendance néerlandaise. Le clocher de l’arrière-plan appartient, lui, à l’ancienne église paroissiale, la Buurkerk, du village voisin de Binnen.

Pour découvrir le reste du tableau, il faudra vous rendre au musée pour le voir parmi d’autres chefs-d’œuvre du Siècle d’Or hollandais. Pensez notamment au week-end des Journées Européennes du Patrimoine les 16 et 17 septembre, où le musée sera ouvert gratuitement le samedi et le dimanche de 10h à 17h30 !

Détail du mois de juillet : ruines, baroque romain et nostalgie…

 

Le détail du mois provient d’une toile intitulée Prière et offrande aux dieux dans un palais en ruine, et est l’œuvre de Giovanni Ghisolfi (1623-1683).
Né à Milan, il s’est d’abord formé avec son oncle Antonio Volpino, un petit maitre, et son style ne s’affirme que tardivement après 1650, à vingt-sept ans, avec son départ pour Rome et sa confrontation avec le style baroque en plein avènement. Giovanni Ghisolfi a également l’occasion de connaître la peinture et l’approche architecturale de Pierre de Cortone, un des artistes théoriciens du Baroque. Ghisolfi se spécialise alors dans les paysages avec des ruines antiques, en s’inspirant des vestiges visibles à Rome et ses alentours.
Notre détail montre la mise en scène extrêmement théâtrale répondant bien au goût du Baroque où semble se jouer une tragédie antique dans ce décor de ruines, avec un groupe de personnages. Leur gestuelle se rapproche de celle des statues dont ils se différencient par la couleur. On peut y voir une vision nostalgique et sublimée de l’Antiquité héritée de la Renaissance, dont les ruines sont les seuls vestiges physiques d’un âge d’or disparu. Une réflexion importante est menée sur le temps qui passe : la méditation s’axe sur ces ruines, vestiges du plus grand Empire que l’Occident ait connu, peu à peu reconquit par la Nature.

Ce tableau des réserves sera exceptionnellement visible à l’occasion des visites VIP le samedi matin pendant l’été, attention c’est uniquement sur réservation !

Détail du mois de juin : un concert d’archiluth…

Le détail du mois de juin est extrait d’une copie d‘après Caspar Netscher intitulée le Concert. Si l’original est conservé à l’Alte Pinacothek de Munich, notre version est l’œuvre d’un peintre anonyme de la fin du XVIIe siècle, issu de l’entourage du Maître.
On connait au moins onze copies répertoriées, prouvant ainsi l’intérêt pour l’œuvre originale pour les peintres de l’entourage de Netscher. Certaines copies présentant des variantes sont attribuées à Netscher lui-même, comme celle visible au musée d’art de l’Université du Michigan depuis 2011. La copie de La Fère présente certaines qualités picturales, notamment dans le rendu des étoffes, une des caractéristiques de Netscher : les vêtements tombent en plis fluides et les motifs du tapis de table sont effectués avec précision.
On y voit un joueur d’archiluth. Cet instrument dérive du luth et se caractérise par des cordes supplémentaires permettant de produire des sons graves. La représentation du luth et ses dérivés est assez courante dans la peinture classique, on le rencontre chez Veermer ou Le Caravage. Il peut être employé comme une allégorie de l’ouïe, et symbolise parfois la poésie lyrique ou la notion d’inspiration. Ici le musicien est plus prosaïquement le participant d’une soirée musicale, dépeinte comme une scène de genre, même si un apport symbolique n’est pas exclu.
Pour découvrir ce tableau des réserves en entier, il faudra venir le découvrir au musée durant le mois de juin, où il sera exceptionnellement présenté dans le cadre des animations le Son des tableaux, qui invite nos plus jeunes visiteurs à découvrir les œuvres du musée en musique !

Journée nationale des mémoires de l’esclavage, des traites et leurs abolitions

 

En ce 10 mai 2023, à l’occasion de la 18ème Journée nationale des mémoires de l’esclavage, des traites et leurs abolitions et en partenariat avec la Fondation pour la mémoire de l’esclavage, le musée vous présente cette représentation d’esclave, visible sur l’Allégorie du Goût, issu de l’atelier anversois de la famille Brueghel. Le raffinement affiché des détails montre l’influence de Rubens, qui possédait également un atelier dans cette ville.
Réalisé à une époque florissante, où Anvers est l’un des grands ports commerciaux à l’échelle mondiale, ce détail illustre l’importance du tristement célèbre commerce triangulaire dans la réussite économique de la ville. Si le port d’Anvers n’était pas un port négrier à proprement parler, il a néanmoins alimenté ce commerce, en armant des navires espagnols notamment.
La représentation de l’esclave noir symbolise les terres exotiques qui font la richesse des commerçants anversois, il incarne l’allégorie de l’Afrique. Il est représenté avec une coupe à boire et à proximité des contenants pour la boisson, indiquant qu’il est utilisé comme domestique. Les représentations de domestiques noirs restent rares dans la peinture flamande du XVIIe siècle car leur présence était exceptionnelle : avoir un Noir à son service était un signe extérieur de richesse car on l’avait fait venir à prix d’or depuis les comptoirs de Guinée.
Vous pouvez également découvrir jusqu’au 3 juin au musée l’exposition temporaire #CestNotreHistoire consacrée à l’histoire de l’esclavage et de ses abolitions en France.

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Détail du mois de mai : un faussaire nocturne…

Le détail du mois de mai vous présente une imitation des productions d’Aert van der Neer, peintre paysagiste du Siècle d’or hollandais, spécialiste des paysages d’hiver et des vues nocturnes. Sa maîtrise des effets de lumière a rendu ses scènes nocturnes célèbres et il a connu plusieurs imitateurs, dont certains n’hésitaient pas à apposer des fausses signatures sur leur travail pour lui donner plus de valeur. C’est le cas ici puisque la peinture comporte un faux monogramme.
Le peintre anonyme réalise ici un pastiche : il imite à la fois le style et la composition des œuvres d’Aert van der Neer, en reprenant les motifs les plus poncifs de sa production et  l’agencement des éléments. Néanmoins, le peintre faussaire devait être moins habile sur les effets atmosphériques que celui qu’il souhaitait imiter, car il a caché le clair de lune derrière un arbre.
Si on ignore l’identité du faussaire, les craquelures irrégulières de la couche picturale prenant l’apparence du cuir sont typique du XIXe siècle, par le vieillissement du mélange des pigments et de l’huile employés à cette époque.
Ce tableau inédit des réserves sera présenté exceptionnellement à l’occasion de la Nuit des musées le 13 mai prochain, venez le découvrir en entier !

Détail du mois d’avril : Golgotha, rédemption et parallèle contemporain…

Le détail du mois d’avril provient d’un panneau réalisé par un artiste du Sud de l’Italie au XVIe siècle. Il représente une crucifixion.

Le détail choisi représente le crâne placé traditionnellement au pied de la croix dans la plupart des représentations de la crucifixion de Jésus avec une vocation double. Il signifie le lieu de la Crucifixion, le mont Golgotha que l’on peut traduire par « Mont du crâne » ou « Lieu du crâne » : c’est une colline située à l’extérieur de Jérusalem, sur laquelle les Romains exécutaient les condamnés à mort. C’est le lieu où Jésus fut crucifié, mais aussi où il aurait été enterré après son exécution. La référence au crâne provient également d’une tradition qui dit que les os d’Adam, le premier homme auraient été enterrés sur le lieu et que le sang de Jésus lors de son supplice aurait coulé sur les os pour racheter les péchés d’Adam.
Le crâne représente également le passage de la mort à la résurrection, l’abandon de l’enveloppe charnelle, le retour à la matière. Il est dans la vision des artistes le symbole de la rédemption du péché originel.

Ce tableau inédit des réserves est exceptionnellement dévoilé à l’occasion de l’exposition d’œuvres de l’Artothèque de l’Aisne au musée jusqu’au 15 avril 2023, où il est mis en rapport avec une vanité contemporaine de Pierre Collin. A découvrir au musée !

Détail du mois de mars : peintre précieux, gros livre et vieille dame…

Le détail du mois de mars vous présente un intéressant petit panneau, intitulé « Intérieur hollandais avec vieille femme lisant » de Jacob van Spreeuwen. Né à Leyde vers 1609 ou 1610, Jacob van Spreeuwen y travaille toute sa vie. Ses derniers tableaux connus datent de 1658, la date de sa mort est incertaine.
L’influence du peintre Gerard Dou semble par contre essentielle dans sa production de scènes de genre dans le style des fijnschilders. Les Fijnschilders, parfois traduit en français par peintres précieux, sont les artistes hollandais qui, entre 1630 et 1710, se sont employés à représenter la réalité avec un maximum de précision.
La scène représente une femme assise sur une chaise basse qu’on trouvait généralement à proximité d’une cheminée pour en exploiter la chaleur. Le gros livre qu’elle tient sur ses genoux est sans doute un livre religieux même si les Hollandais avaient accès à d’autres lectures. Les femmes hollandaises sont alors parmi les plus lettrées d’Europe et même les filles des classes les moins aisées peuvent accéder à l’école, la maitrise des lettres et des chiffres étant nécessaire pour nombre de métiers exercés dans les Pays-Bas septentrionaux.
Si l’éducation a des vertus d’émancipation, le tableau est néanmoins nuancé par la présence, à l’arrière de la chaise, du rouet symbole du travail domestique féminin au sein des maisons.

Vous pourrez découvrir ce tableau des réserves durant la visite « les Femmes du musée » consacrée à l’iconographie féminine au sein des collections le 8 mars prochain. Petit bonus, cette visite est gratuite pour les femmes !