Le détail du mois de février provient de Berger assis et son troupeau de chèvres, œuvre anonyme d’un artiste italien ou hollandais de la première moitié du XVIIe siècle. En effet, la forte influence de la peinture du Caravage sur cette toile pourrait aussi bien être l’œuvre d’un peintre italien que d’un des membres des Caravagesques d’Utrecht, un groupe de peintres qui a exporté les techniques du Maître en Hollande.
L’artiste semble en tout cas se situer dans le mouvement du caravagisme, diffusé bien au-delà de l’Italie. Rome est au début du XVIIe siècle le centre artistique par excellence et des artistes de tous les pays viennent y travailler et découvrent l’œuvre du Caravage. Dans l’atmosphère de révolution picturale qu’il incarne, beaucoup d’artistes européens suivent la voie qu’il établit et appliquent avec succès la fameuse Manfrediana Methodus qui est une recette pour imiter le style du Caravage, relayée par son premier disciple, Manfredi.
La thématique de notre toile renvoie également au style caravagesque par son sujet naturaliste, qui s’inspire des personnages des classes populaires italiennes, traité avec réalisme. Comme souvent à cette époque, on peut également trouver une connotation religieuse à cette peinture. Le Christ est souvent comparé à la figure du bon pasteur, et saint Jean-Baptiste est également berger : ses attributs sont la houlette de berger et le troupeau. L’animal guidé par le pâtre est une personnification du fidèle, tout comme l’animal, élevé pour sa chair ou son lait, pourrait aussi évoquer le sacrifice du Christ.
Pour découvrir cette peinture, rendez-vous au musée Jeanne d’Aboville, où l’on attirera tout spécifiquement votre attention sur cette oeuvre dans le cadre de l’exposition Des Collections révélées à partir du 29 février !
A cause des conditions météorologiques, le musée ne sera pas accessible ce jour. Prenez garde au verglas et limitez vos déplacements pour éviter de vous retrouver comme ce patineur issu du tableau “la Vente de poissons” de Salomon Ruysdael.
Ce tableau répond à la définition d’un paysage d’hiver, qui représente un horizon enneigé animé de personnages se livrant à des activités typiques de l’hiver.
Dans l’art occidental, le peintre flamand Pieter Brueghel l’Ancien (1525-1569) peut être considéré comme le créateur de la tradition du paysage hivernal, particulièrement développée en Hollande ensuite. En effet, les peintres du Siècle d’or vont souvent représenter des patineurs évoluant sur les lacs et canaux gelés, activité courante et très populaire.
Il est aussi intéressant de constater que cette mode du paysage d’hiver correspond à la phase paroxystique du Petit âge glaciaire, situé entre 1565 et 1665.
Le détail du mois de janvier revient sur un épisode d’actualité avec une Adoration des Mages ! Œuvre d’un faussaire allemand du milieu du XIXe siècle, son style imite les œuvres du XIVe siècle produites en Bavière, en Autriche et en Bohême.
On y voit les trois rois-mages différenciés par la couleur de leur robe et la nature de leur présent. Les mages sont nommés à partir du IXe siècle après Jésus Christ et se voit rattacher chacun un présent de manière spécifique : Melchior offrit l’or de la royauté ; Gaspard l’encens pour évoquer la divinité ; Balthasard apporte la myrrhe, un parfum qui servait à embaumer les morts dans l’Antiquité faisant allusion à la mort du Christ, mais aussi à sa résurrection.
Un récit oriental de l’Antiquité tardive explique à ce propos que les mages entendent mettre Jésus à l’épreuve afin de connaître sa nature exacte : s’il est roi, il choisira l’or, s’il est prêtre, l’encens, et s’il est médecin, il optera pour la myrrhe. L’enfant déconcerte les trois sages en choisissant les trois présents.
Les mages sont également représentés avec des barbes de longueur différentes pour suggérer des différences d’âges : les trois réunis symbolisent les trois âges de la Vie.
Ce tableau des réserves n’est actuellement pas visible mais vous pouvez découvrir une autre spectaculaire Adoration des Mages en salle anversoise ! On vous souhaite une belle fête de l’épiphanie, n’abusez pas (trop) de la galette !
Après plusieurs mois de restauration, Saint Acace et les dix mille martyrs est revenu de restauration.
Passé entre les mains de deux restaurateurs, respectivement pour le support bois et le la couche picturale, Saint Acace révèle ses couleurs originelles et a pansé les plaies laissées par les affres du temps, et parfois les restaurations précédentes.
La restauratrice spécialiste du support bois Juliette Mertens est intervenu par la dépose de deux traverses ajoutées au dos et le retrait de pièces de bois plantées dans le panneau qui causaient des fentes dans le bois.
Les fentes ont été colmatées pour permettre le travail du restaurateur de la couche picturale, Igor Kozak, qui a procédé à un nettoyage de la couche picturale en retirant les repeints des précédentes restaurations et en enlevant le vernis oxydé.
Ce tableau a fait l’objet de recherches par l’équipe de l’Institut national de l’Histoire de l’art, sous la direction de la Conservatrice et Historienne de l’art Isabelle Dubois-Brinkmann, dans le cadre d’un Répertoire des peintures germaniques dans les collections françaises (1300-1550). Il sera présenté au musée de Besançon à l’été 2024 pour une exposition consacrée aux Trésors du Saint Empire. En attendant, vous pouvez le redécouvrir au musée Jeanne d’Aboville à partir du 3 janvier !
Le 23 décembre, le musée Jeanne d’Aboville vous propose une visite thématique inédite sur les représentations de la nativité et de l’adoration des mages dans les collections du musée. Ces thèmes religieux vont inspirer les artistes durant plusieurs siècles et connaitre des réinterprétations et des ajouts témoignant des mœurs de l’époque et des aspirations de leurs auteurs. Ils s’enrichissent d’éléments folkloriques puisés dans des récits merveilleux et des textes apocryphes, tels le bœuf et l’âne de la crèche, pas du tout mentionnés dans les évangiles !
Cette visite sera l’occasion de découvrir des tableaux inédits des réserves, ainsi qu’un triptyque flamand tout juste restauré et présenté de nouveau au public à cette occasion.
Infos pratiques :
La visite de Noël au musée Jeanne d’Aboville
Deux séances proposées le 23 décembre 2023, à14h30, puis 16h.
Durée : environ 40 mn
Tarifs : 4€
Réservation conseillée auprès du musée au 03 23 56 71 91.
A l’occasion de la Sainte Barbe aujourd’hui, voici une peinture des réserves représentant la sainte martyre.
Cette œuvre de par son élégance et sa délicatesse nous laisse supposer qu’elle fut réalisée au cours du XVIIe siècle par un peintre actif à Rome.
Sainte Barbe est une vierge martyre du IIIe siècle ayant vécu en Asie Mineure. Elle est la fille de Dioscore, un riche édile païen. Lors de l’un de ces voyages et afin de garder intact la pureté de Barbe, il prit la décision d’enfermer sa fille dans une tour à deux fenêtres. Durant ce périple, Barbe reçu le premier sacrement prodigué par son percepteur Origène. Afin de manifester sa foi, elle perça une troisième fenêtre qui symbolise avec les deux autres la Trinité. A son retour de voyage, son père se rend compte de la conversion de sa fille au Christianisme. Furieux, il mit le feu à la tour mais Barbe réussi à s’échapper. Dénoncée par un berger mal-attentionné, son père la traîna devant le gouverneur romain Marcien qui la condamna à de nombreux supplices afin d’abjurer sa foi. N’y parvenant pas, il demande à Dioscore de décapiter sa fille mais la foudre le frappa quelques instants plus tard le tuant sur le coup.
Sainte Barbe est souvent représentée devant une tour comme ici au second plan.
La palme que tient la sainte est un second attribut, symbole du martyr qui symbolise la victoire sur la mort et le mal.
Ce tableau a pour particularité d’être peint sur du cuivre. Pratique qui connait son apogée entre le XVIe et le XVIIIe siècle, sa conservation est plus facile en raison de sa relative inertie. Le cuivre n’absorbant pas la peinture, les tons sont plus riches et les couleurs saturées. Cette technique permet de peindre des détails minutieux et ainsi donner un caractère précieux à l’œuvre.
Le détail du mois vous présente une œuvre attribuée à Petrus Gerardus van Os (1776-1839) représentant un berger et son troupeau dans un paysage. Van Os est un peintre de La Haye, formé par son père lui-même peintre et spécialiste des natures-mortes. Il suit les pas de son père après un passage dans l’armée (il participe notamment au siège de Naarden pendant les Guerres napoléoniennes), et devient professeur de dessin jusqu’à sa mort. II s’est exercé dans tous les genres et dans toutes les disciplines, passant de la peinture à l’aquarelle, la gravure, la lithographie ou la miniature.
Petrus Gerardus van Os appréciait dans son travail les effets de lumière contrastés. Ici il renforce tout particulièrement cet effet en faisant se côtoyer une vache blanche et une vache noire. L’attention au détail se perçoit dans l’ombre portée de la corne de la seconde vache. Une autre caractéristique de son travail est le rendu naturaliste des animaux, typique des peintres tardifs de La Haye, soucieux de rendre les anatomies et les volumes avec exactitudes.
Ce tableau provient des réserves et n’est actuellement pas visible dans l’exposition permanente mais d’autres œuvres représentant des paysages animés sont bien sûr exposées au musée. On vous propose même de revenir sur le rôle du bœuf de la crèche de Noël à l’occasion de la visite du 23 décembre !
En ce 25 novembre, nous fêtons les Catherine, en référence à la figure de Sainte Catherine d’Alexandrie.
Vierge et martyre qui aurait vécu aux IIIe et IVe siècles en Egypte, son culte fut très populaire au Moyen-Age, importé en Occident par les Croisés. Sa fête donne maintenant lieu à diverses célébrations populaires, dont celles des jeunes filles à marier, appelées les Catherinettes. Cette fête religieuse a disparu du calendrier romain en 1969, « en raison du caractère fabuleux de sa passion » et du doute qui pèse sur l’existence même de la sainte. Le thème inspira de nombreux peintres de la Renaissance italienne. Le musée possède plusieurs exemples intéressants présentant le moment de la vie de la sainte le plus intense, celui de son mariage mystique avec Jésus.
La légende de sainte Catherine d’Alexandrie
Cette légende nous est connue principalement par la Légende dorée de Jacques de Voragine.
Catherine serait née vers 290 dans une famille noble d’Alexandrie et reçoit une éducation soignée. Un jour, elle voit une séance d’apostasie (abandon et reniement de sa foi) de Chrétiens organisée par l’empereur Maxence ; elle s’adresse à lui et argumente dans un débat contre lui de façon remarquable où elle tente de convaincre l’empereur de l’existence du dieu unique des Chrétiens. Celui-ci constatant qu’il ne pourrait trouver de parade à la sagesse de Catherine convoque une assemblée de cinquante doctes grammairiens et rhéteurs. Catherine, encouragée par un ange du Seigneur lui recommandant de résister avec constance, s’adresse à l’empereur devant les orateurs puis elle réussit à les faire taire par la pertinence de son argumentation, et à les convertir. L’empereur les fait aussitôt brûler au milieu de la cité. Séduit par sa jeunesse et son « incroyable beauté » l’Empereur lui propose une place dans son palais, en second rang après la reine. Elle répond : « Cesse de tenir de tels propos. Je me suis donnée comme épouse au Christ. Rien ne pourra m’éloigner de l’amour que j’ai pour lui. ». L’empereur la fait alors dévêtir, frapper à coups de croc de fer, et jeter dans une prison obscure sans alimentation pendant douze jours. Le Christ envoie une colombe blanche qui nourrit la prisonnière « d’un aliment céleste ». À son retour, l’empereur lui propose une nouvelle fois d’être sa compagne, ce qu’elle refuse à nouveau. Un préfet conseille alors au roi un supplice féroce pour la vierge afin d’effrayer les autres Chrétiens. Quatre roues entourées de scies de fer et de clous doivent lui déchirer et broyer le corps. Alors Catherine pria le Seigneur de détruire cette machine. « Et voilà qu’un ange du Seigneur frappa et brisa cette meule avec tant de force qu’il tua quatre mille païens. » L’empereur propose une dernière fois à Catherine de devenir son épouse. Elle refuse encore et il la condamne à être décapitée. Quand elle est conduite au lieu d’exécution, elle prie Dieu puis, quand elle est décapitée, du lait jaillit de son cou en guise de sang. Alors des anges prennent son corps, l’emportent jusqu’au mont Sinaï, et l’ensevelissent avec beaucoup d’honneurs jusqu’à sa redécouverte au VIIIe siècle par des moines établis sur le Mont.
Sainte Catherine au musée
Le musée possède plusieurs représentations du mariage mystique de la sainte, en voici deux exemples puisés dans les collections italiennes :
Mariage Mystique de sainte Catherine Biagio Pupini, dit Biagio delle Lame (Bologne, actif 1511 – après 1575)
Peintre principalement actif à Bologne, il plane plusieurs zones d’ombre sur la vie de Biagio delle Lame. On lui connait néanmoins de nombreuses collaborations avec d’autres artistes et une place importante au sein de la guilde des peintres et sculpteurs de sa ville natale.
Si les visages et les mains aux longs doigts évoquent l’influence du peintre Le Parmesan, les figures ont surtout ici un usage symbolique, sainte Catherine, l’enfant Jésus et enfin saint Joseph, voient leurs têtes alignées dans une évocation des trois âges de la vie.
Le moment que présente le tableau est donc le mariage mystique avec le Christ, puisque Catherine a déclaré qu’elle lui était destinée. Il s’agit d’une élévation spirituelle, qui atteint une forme d’union avec le Christ assimilable à un mariage. Celui-ci est symbolisé par l’anneau que Jésus lui présente.
Mariage mystique de sainte Catherine Girolamo da Santa Croce (Santacroce, 1480 – Venise 1556)
Peintre vénitien du XVIe siècle, Girolamo fut un élève de Giovanni Bellini par lequel il acquit la maitrise du style Renaissance. S’il travailla principalement dans et autour de Venise, on trouve également trace de son oeuvre en Dalmatie, notamment un retable situé à l’église paroissiale de Blato (Croatie).
On voit généralement transparaitre dans les oeuvres de ce peintre l’influence de Bellini, dans ce tableau, on remarque plutôt sa volonté de se placer en suiveur d’un autre grand maitre vénitien en la personne de Titien. L’intégration de détails est inspirée des scènes pastorales de celui-ci : la vieille femme juchée sur sa mule à gauche et le vacher à droite, tous deux placés dans le paysage, créent un climat évocateur qui répond à l’aspect verdoyant de l’ensemble.
Les figures principales, la Vierge à l’enfant et Sainte Catherine, semblent quant à elles inspirées de travaux familiaux, Girolamo venant d’une famille de peintres bergamasques. Elles s’inscrivent dans un cadre représentatif typiquement vénitien.