Retour de restauration pour Vertumne et Pomone

Le tableau avant restauration PHOTO FRANCK BOUCOURT

Le  13 décembre, retour d’une œuvre de la campagne de restauration 2024 au musée Jeanne d’Aboville : il s’agit d’une œuvre flamande du XVIIe siècle représentant une scène mythologique.

Vertumne et Pomone, un mythe latin

Vertumne et Pomone est un mythe romain qui évoque la nymphe protectrice des arbres fruitiers, Pomone qui est poursuivie par les assiduités du dieu des changements, Vertumne. Celui-ci a le pouvoir de se transformer à volonté et va prendre la forme de plusieurs personnages pour faire son propre éloge auprès de Pomone, mais celle-ci reste indifférente. Il prend finalement la forme d’une vieille femme qui peut approcher plus facilement Pomone et lui vante les vertus de l’amour et du mariage. Une fois Pomone convaincue, il change de forme et lui présente son vrai visage : elle tombe instantanément amoureuse.

L’auteur retrouvé

Ce mythe a été représenté de nombreux fois dans l’art et il a pu être réattribué à Jan Pauwel Gillemans (1651-1704) grâce à des recherches menées par le musée. Le tableau a notamment pu être comparé sur photo avec un autre tableau de l’artiste sur le même thème passé en salle des ventes récemment.
Jan Pauwel Gillemans le jeune réalise des tableaux décoratifs mettant en scène des fleurs et des animaux. Il fut élève de Joris van Son, également spécialiste des natures mortes, tout spécifiquement des représentations de fleurs et de fruits.
Il a travaillé en collaboration avec des peintres de paysage et des peintres de figures, et on peut supposer que Peter Ykens, un autre peintre anversois, spécialiste des représentations humaines a réalisé sur cette peinture Vertumne, sous les traits d’une vieille femme, et Pomone.
Jan Pauwel Gillemans le Jeune a multiplié les déplacements entre les Flandres et la Hollande, il meurt lors d’un de ses voyages en tombant ivre dans un canal.

Une petite particularité

Jan Pauwel le jeune développe un style qui lui est spécifique, manifestant une appétence pour la représentation d’animaux exotiques : on trouve par exemple beaucoup de perroquets dans sa production. L’œuvre ici présentée comprend plusieurs espèces de perroquets mais également de manière plus incongrue un dodo, le célèbre oiseau de l’île Maurice dont l’espèce a aujourd’hui disparu.
Les représentations de dodo sont très à la mode au XVIIe siècle et on les retrouve dans de nombreuses œuvres flamandes et hollandaises.

Gravure dans A Natural History of Uncommon Birds de George Edwards, Londres, 1750

La représentation de l’oiseau circule sous forme de gravure où il est généralement accompagné d’un cochon-d’inde. Gillemans semble s’être inspiré d’une de ces gravures car l’oiseau est représenté en compagnie d’un de ces petits rongeurs que l’artiste a l’habitude de représenter pour animer le premier plan de certaines de ses natures-mortes.
On trouve également sur cette peinture un kiwi, espèce en provenance de Nouvelle-Zélande.

La restauration

Le tableau a fait l’objet d’une restauration complète dans l’atelier du restaurateur Igor Kozak : celui-ci a changé le rentoilage ainsi que le châssis tendant la toile. Il a également traité la couche picturale encombrée de nombreux repeints, couvrant la peinture originale. Il a également retiré les vernis anciens qui s’étaient oxydés avec le temps, permettant de révéler aux yeux du public les couleurs d’origine de cette peinture inédite des réserves.

Vous pouvez redécouvrir le tableau dès aujourd’hui au musée !

Détail du mois de décembre : hypothèse d’attribution, cerceau et âge de raison…

Le détail du mois de décembre vous présente une charmante scène d’étable. Le nom de Marc-Antoine Bilcoq (Paris, 1755 – 1838) est proposé mais cette attribution doit être confirmée. Reçu à l’Académie comme peintre de genre en 1789, il affectionne les scènes de vie paysannes auxquelles il ajoute une atmosphère intimiste. Cette toile fait penser à d’autres compositions qui lui sont attribuées, par les lignes d’architecture du décor qui viennent encadrer les protagonistes de la scène. Il est assez courant également de retrouver dans ses tableaux des duos d’enfants.

Nous pouvons y voir la vie d’une étable, avec un cheval visiblement utilisé comme animal de bât au vu de son harnachement mais également des volailles cherchant du grain dans le foin. Les deux enfants sont d’âge différent, et ce détail est marqué par leur activité : le garçon portant un bonnet tient un cerceau, symbole de jeu, alors que la jeune fille accroupie a été interrompue dans son travail, comme en témoigne le baquet débordant de linge à sa droite.

Ce tableau des réserves n’est actuellement pas présenté pour des raisons de conservation, mais vous pouvez découvrir de nombreuses autres scènes paysannes au musée !

Retour d’expo pour la Flagellation allemande

Après un séjour au musée des beaux-arts de Dijon, la Flagellation du Christ, attribué au Maître de la Crucifixion de Blaubeuren est revenu au musée. .

Ce tableau fait partie d’un polytyque dont deux autres panneaux se trouvent aujourd’hui au musée national de Stuttgart. Le maître qui l’a réalisé aurait travaillé sur le retable en question peu avant 1500.

Le dessin incisif contribue à donner une certaine dureté à l’ensemble, accompagné par des contrastes violents de couleurs entre les teintes claires et les sombres. L’allongement des formes et la recherche de pathétique évoque une influence de l’art des Pays-Bas septentrionaux.

La position du Christ reprend le contraposto antique (une attitude du corps humain où l’une des deux jambes porte le poids du corps, l’autre étant laissée libre et légèrement fléchie). Il y a une véritable recherche d’expression dans la manière de peindre les visages, renforçant l’atmosphère tragique de la scène.

Détail du mois de novembre : église, conversation et fausse perspective…

Le détail du mois de novembre provient d’un Intérieur d’église d’un artiste anonyme flamand du XVIIe siècle, mais visiblement sous l’influence de l’atelier anversois des peintres Pieter Neefs I et II, un père et son fils qui se sont spécialisés dans les vues d’architecture. La production de Pieter Neefs le Vieux fut très abondante et il est très difficile de la distinguer de celle de son fils. On a pu recenser plus de 400 tableaux qu’il réalisa avec des collaborateurs et ses deux fils Lodewijk et Peeter.

Le peintre anonyme se place dans leur sillage, avec cet intérieur d’église, sujet alors à la mode qui permet à la fois de représenter des perspectives, animées par la minutie des détails et des jeux de lumière. Ce peintre n’atteint néanmoins pas le degré de précisions des œuvres sortant de l’atelier Neefs et l’on constate rapidement de nombreuses erreurs dans le rendu des perspectives, dues à la démultiplication des points de fuite.
Le staffage, soit l’ajout de personnages pour animer la scène, est sans doute réalisé par un autre artiste spécialiste de ce sujet : on peut voir deux hommes élégamment vêtus discuter ensemble tandis qu’en arrière-plan un groupe de fidèles écoutent un homme d’église monté en chaire pour prêcher. Cette scène tend à rendre l’atmosphère qui était celle des églises, à la fois lieu de spiritualité et de sociabilité.

Cette peinture est à découvrir en intégralité au musée, on vous souhaite un beau mois de novembre !

En ce jour de Toussaint…

Cette fête, comme son nom l’indique, est le jour où l’Église catholique honore tous les saints, connus et inconnus. La célébration de cette fête chrétienne au 1er novembre est une spécificité catholique apparue en Occident au VIIIe siècle. En effet, c’est à partir de cette période qu’elle est fêtée le 1er novembre, lorsque le pape Grégoire III dédicace à tous les saints une chapelle de la basilique Saint-Pierre de Rome.

C’est un jour de visite traditionnelle des cimetières car la Toussaint précède d’un jour la Commémoration de tous les fidèles défunts.

Ci-dessous on vous laisse découvrir le panneau central du triptyque du couronnement de la Vierge, qui présente de nombreux saintes et saints :

Organisé par cercle, vous trouvez au premier rang des personnages de l’Ancien Testament, ainsi que des Pères de l’Eglise, au deuxième rang les saintes et au troisième rang les saints. certains sont aisément reconnaissable à leurs attributs, comme Sainte Barbe, représentée avec la tour à trois fenêtres où elle fut enfermée :

Ou Saint André avec la croix caractéristique de son martyr :

 

La visite de Noël : la crèche de Noël dans les Collections…

Le 21 décembre, le musée Jeanne d’Aboville vous propose une visite thématique sur les représentations de la crèche de Noël dans les collections du musée. Ce thème religieux inspire les artistes depuis des siècles et témoigne des mœurs de l’époque et des aspirations de leurs auteurs. Ils s’enrichissent d’éléments folkloriques puisés dans des récits merveilleux et des textes apocryphes, tels le bœuf et l’âne de la crèche, pas du tout mentionnés dans les évangiles !
Cette visite sera l’occasion de découvrir des tableaux inédits des réserves.

Infos pratiques :
La visite de Noël au musée Jeanne d’Aboville
Deux séances proposées le 21 décembre 2024, à14h30, puis 16h.
Durée : environ 40 mn
Tarifs : 4€
Réservation obligatoire auprès du musée au 03 23 56 71 91.

Détail du mois d’octobre : ténèbres, moine et bâton étrange…

photo Lionel Feys, Ville de La Fère

Le détail du mois d’octobre vous dévoile un tableau inédit des réserves, œuvre d’un peintre anonyme du XVIIe siècle, visiblement sous l’influence de José de Ribera dit lo Spagnoletto (1591-1652) et s’inscrivant dans le courant du Ténébrisme. Le Ténébrisme est l’une des caractéristiques du style du Caravage et a été repris par de nombreux peintres à sa suite : les figures se détachent en pleine lumière sur les ténèbres qui les environnent et provoquent un effet de contraste dramatique.

Le détail vous montre le visage d’un moine en extase, les yeux tournés vers le ciel. Il a été identifié à un personnage en particulier : il s’agit ici de Saint Antoine le Grand, également connu comme Antoine d’Égypte, Antoine l’Ermite. Ce mystique des IIIe et Ive siècles après Jésus Christ mène une vie d’ascète et d’ermite et va peu à peu constituer une communauté autour de lui : l’Eglise le considère comme le père du monachisme chrétien.
La vie de saint Antoine et ses tentations ont inspiré de nombreux artistes et le peintre a choisi ici une représentation sobre, se basant sur peu d’éléments pour suggérer la modestie de sa vie matérielle. Saint Antoine est généralement représenté sous les traits d’un homme âgé – il meurt à l’âge de 105 ans ! -, et vêtu d’une robe de bure pour suggérer la vie monastique. Il a généralement un bâton de marche à la forme bien spécifique : il figure un Tau, la dix-neuvième lettre de l’alphabet grec. On appelle ce bâton la croix de saint Antoine ou béquille de saint Antoine. Cet attribut ne trouve pas d’explication bien définie, en dehors du fait que le Tau est un signe de paix, de bénédiction, de prédestination divine. Ici la forme est juste suggérée avec un bâton se terminant de manière bifide.

Ce tableau n’est pas actuellement pas présenté pour des raisons de conservation mais d’autres œuvres vous attendent au musée Jeanne d’Aboville, à bientôt !

C’est la rentrée pour l’école du village

l’école du village, Harmen HALS

 

C’est bientôt la rentrée, on vous propose d’observer ce tableau intitulé l’école du village !

Attribué à Harmen Hals (Haarlem, 1611 – 1669), cet artiste est le fils aîné de Frans Hals, qui lui dispense sa formation dans son atelier de Haarlem.

Harmen Hals a laissé une production majoritairement composée de tableaux représentant des scènes populaires, à l’image de cette petite école installé dans un bâtiment rustique. La gamme de couleurs ocres est typique de sa production et les visages mal dégrossis des personnages témoigne de l’influence de son père, célèbre pour ses tronies, représentant les expressions des personnages de manière caricaturale et exagérée.

On y voit l’école d’un village hollandais, typique du système de petites écoles qui se développe en Hollande septentrionale durant la période moderne. Les Pays-Bas ne possédaient aucun organisme central chargé d’administrer ou de contrôler l’enseignement, l’organisation des petites écoles, l’équivalent de nos écoles primaires et maternelles, était de l’initiative de particuliers ou d’associations privées, qui agissaient avec l’approbation municipale. L’école à la campagne est souvent installée dans une annexe de l’église, voire dans une grange un ou une étable, alors qu’en ville la population a accès à de véritables écoles avec des pupitres, des bancs, et du chauffage.

Le professeur placé au centre du tableau adopte une posture de découragement destiné à produire un effet comique. Dans les petites écoles de village, le maître a parfois plutôt fonction de simple surveillant. Des guildes de maîtres d’école se forment peu à peu au XVIIe siècle et exercent un contrôle sur le contenu des enseignements. Néanmoins beaucoup de parents se plaignent du faible niveau de ces maître d’école, un rapport de 1611 décrit des professeurs incapables de nommer correctement les lettres de l’alphabet ! Ce n’est qu’en 1665 qu’une ordonnance exigera des maîtres d’école une connaissance correcte de l’écriture et de la lecture. Malgré ses défauts, les petites écoles hollandaises vont permettre une large alphabétisation de la population, qui présente le meilleur taux d’Europe à cette époque, car les écoles hollandaises accueillent les garçons comme les filles.

Le garçon placé dans la lumière à gauche semble lire à voix haute. Le programme de l’enseignement de l’école se réduit a l’histoire sainte, la lecture l’écriture et au calcul. L’arithmétique élémentaire à cause de son importance commerciale fait l’objet d’un soin particulier de la plupart des maîtres. L’écriture et en savoir prestigieux et la calligraphie un véritable art esthétique. La renommée des maîtres hollandais en la matière dépassera les frontières du pays.

 

On souhaite une excellente rentrée à tous les élèves ainsi qu’à leurs professeurs ! Le service éducatif du musée les attend pour une sortie à La Fère pour découvrir tous les secrets de la peinture hollandaise !

Fin du récolement des Collections Beaux-arts

Après plusieurs mois de travail, le récolement décennal des collections beaux-arts du musée Jeanne d’Aboville est terminé !

La vente de poissons de Salomon Rhuysdael a été la dernière oeuvre à être recensée, recevant le numéro de fiche 377.

Le récolement est obligatoire depuis la loi Musée de 2002 et doit être réalisé tous les dix ans : il permet de vérifier que toutes les pièces constituant le fonds du musée sont bien présentes, vérifier leur état, les dépoussiérer si besoin et vérifier que les objets sont bien munis d’un numéro correspondant à l’inventaire et lisible. C’est aussi l’occasion de mettre à jour des données concernant les avancées scientifiques sur les œuvres , en affinant notamment leur attribution.

Le récolement permet également de planifier des programmes d’amélioration des conditions de gestion et de conservation : un bilan sanitaire des œuvres les plus endommagées va être réalisé en complément à l’automne. Des restaurateurs vont examiner les œuvres, procéder à des opérations d’urgence si besoin et proposer des solutions pour optimiser leur conservation.